Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/308

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moi un militaire pour que je ne fusse pas un méchant avocat ; mais franchement, je n’ai guère plus de goût pour ma seconde profession que pour la première : je n’aime que la musique. On dit que je joue passablement du violon, mais je ne m’amuse guère en jouant la musique des autres, je voudrais entendre jouer la mienne et je crois que je serais capable d’en faire d’assez jolie, si je savais comment m’y prendre. Voulez-vous m’enseigner le moyen ?

— Monsieur le chevalier, confidence pour confidence. Je suis moins riche que vous, car je n’ai pas d’appointements ni de pension, mais je gagne assez d’argent avec mes leçons. Seulement, il faut pour cela que je sorte tous les jours à sept heures été comme hiver et que je coure le cachet toute la journée. Je rentre le soir exténué, mais néanmoins, je puis vous donner une heure tous les matins, c’est celle qui s’écoule entre mon lever et ma sortie ; je la consacre à ma toilette ; mais, pendant qu’on me rasera qu’on me poudrera et que je m’habillerai, je trouverai toujours moyen de vous donner quelques conseils. Cela vous convient-il ?

— Parfaitement. Où demeurez-vous ?

— Hôtel Monaco, près des Invalides. Et vous ?

— À Versailles, à l’hôtel des Gardes, et à Paris, place Royale.

— C’est un peu loin, pour une heure si matinale.

— N’importe, je serai exact, soyez-en sûr. À quand ?

— Mais à demain, si vous voulez.

— À demain donc.