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LE DERNIER SOIR

ciel léger : Venise toute entière qui chante. Tout à coup, il sent une douleur affreuse, comme celle d’une blessure où du gravier aurait coulé. Morte… Qui çà… Ninette ? Ninette morte. Et le ciel est bleu. Et tout n’est pas sombre et ce n’est pas la nuit. Voyons, voyons, c’est la nuit que l’on enterre. Puisque Ninette est morte, il n’y a pas de soleil. Mais elle n’est pas morte… Non, elle vit encore, et tout à l’heure, tel qu’aux anciens jours, Jacques ira retrouver son sourire et ses yeux, ses yeux attirants de fleurs malades. Le miracle, peut-être ? Si Dieu avait permis le miracle aujourd’hui. Ninette, ma bien-aimée, tes prunelles vont-elles étinceler à l’aurore ? Mais la douleur revient lancinante. Jacques se souvient de l’heure terrible hier, de l’arrivée des prêtres, du lit tout blanc, de la jeune fille transfigurée… Oh, cette odeur amère et triste des chrysanthèmes ! Les lueurs des cierges qu’il distinguait sur le fond noir des cagoules par l’embrasure de la