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NOTRE-DAME DES MERS MORTES

encore de l’adieu de Sforzi. Une douceur bleue et grise enveloppait d’ombre la pièce. C’est curieux, comme la nuit, chaque objet, même le plus usuel et le plus commun se transforme en fluidité d’au-delà de la terre. Peut-être le silence… peut-être simplement le rêve. En allant vers une des fenêtres grandes ouvertes sur les lagunes, Jacques respira mêlé au parfum des fleurs lointaines du Lido, le parfum plus âcre, plus salé des brises maritimes. Il aperçut comme à l’arrivée, comme au crépuscule, Venise coiffée par le soir obscur, toute nue dans la mer. Il la vit lumineuse, avec ses diamants et ses gemmes, avec l’orgueil de ses colliers d’astres. Et d’elle germait un ferment d’amour. Alors il pensa à ce que lui avait murmuré Sforzi en lui désignant de la main les ruelles et les canaux, les grands palais en face des lagunes… Une église… une église à cause du mysticisme toujours gardé, des conquêtes anciennes, des épopées fabuleuses accomplies