Page:Adelsward-Fersen - Notre-Dame des mers mortes (Venise).djvu/89

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
77
LE PALAIS LABIA

main, tout cela, la princesse le connut. Elle jouait du piano merveilleusement. Sa voix était encore fraiche malgré les sanglots dont sa gorge avait frémi. Elle dut s’informer pour savoir si l’on ne voudrait pas lui accorder quelques leçons. C’était sa seule ressource. Ses parents morts, leur fortune engloutie il y a beau temps par le prince, ses cousins vénitiens inexorables, méprisant d’ailleurs sa naissance. Elle dut s’informer : le commencement du Calvaire. Elle finit par obtenir quelques heures de piano chez des familles de commerçants où d’artistes. Ce sont ceux-là qui ont le plus de cœur. Peut-être existait-il chez eux un sentiment de fierté rancunière, pas à l’atelier, mais dans l’arrière boutique. — Une princesse, ma chère. — Elle est au cachet ! — Les émigrés modernes !… Elle y allait à la tombée du jour, le visage couvert d’une épaisse voilette, après avoir rendu des visites toute l’après-midi, après avoir taillé de menus objets de lingerie qu’elle cachait aussi,