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HOMME

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le blanc, au lieu que, chez les singes, il est nolablemenl plus aigu.

5* Insuffisance des différences d’ordre intellectuel et moral. — Il n’y a pas de doute que les races liuiuaines présentent entre elles de grandes dilTérenees intellectuelles et morales : il y a des races cultivées et des races incultes, des races supérieures et des races intérieures. Mais ces divergences n’ont point une telle importance qu’elles puissent caractériser des espèces distinctes. En effet, a) ces différences se rencontrent dans des groupements humains qui descendent certainement de la même souche : à Paris, parexemple, on trouve des gens à demi sauvages à c6té de gens de très haute culture ; de même, chez les Fuégiens, les Boschimans, les.ustraliens, où la culture générale est misérable, on trouve des hommes très dévelopi)ès, parfaitement capables de s’initier aux lettres et aux sciences ; //) les différences qu’on signale portent sur le degré et non sur la nature du développement : car il y a partout langage articulé, industrie, œuvres d’art, culte religieux, morale ; le progrès vers un degré supérieur est possible partout ; <) si les dilTérenees du degré de culture tenaient à la nature des races et non aux conditions de leur existence, chaque race serait astreinte à demeurer dans le niveau où la cantonnerait sa nature : mais il n’en va point ainsi, puisque, chez les individus et chez les peuples, on assiste à de consolantes ascensions et à de lamentables déchéances.

6" Insuffisance de ladiversité des langues. — Renan, qui, volontiers, disait tour à tour le pouret lecontrc dans une même question, a précisément usé de cette liberté de contradiction sur l’importance delà diversité des langues. En 1 855, dans l’Histoire des langues sémitiques, il écrivait que, « si les planètes sont peuplées d’êtres organisés comme nous, on peut atfirmerque l’histoire et la langue de ces planètes ne diffèrent pas plus des nôtres que l’histoire et la langue chinoise n’en diffèrent n. Le 16 mars 1898, il écrit au contrairedansla i ?efue/)o////(jrHe e^ littéraire, que « de la division des langues en familles, il ne faut rien conclure pour la division de l’espèce humaine ! » C’est cette dernière conclusion qui est la bonne. En effet, fl)si des langues irréductibles devaient prouver la distinction d’origine des peuples qui les parlent, il faudrait dire que les nègres africains descendent de souches différentes : qui prouve trop ne prouve rien ; b) si le langage naturel, ou l’expression spontanée des sensations et des passions, différait profondément, on pourrait avoir quelque doute siu- l’unité d’espèce, mais quand le langage conventionnel présente de profondes différences, cela importe peu ; or le langage naturel est partout sensiblement le même, le langage arliliciel seul varie ; mais, tout en variant dans la forme, du moment qu’il en existe un dans toutes les races, cela prouve que toutes les races sont de même nature ; c) on sait aujourd’hui sous l’influence de quelles causes les langues se forment et se différencient, et ces causes n’ont rien à voir avec la nature des hommes qui parlent ces langues : ainsi la langue s’enrichit chez un peuple qui prospère, elle s’appauvrit chez un peuple qui tombe ; l’unité politique dans un peuple fait l’unité delà langue, au lieu que le fractionnement donne naissance à des dialectes particuliers ; le commerce unifie les langues, au lieu que l’isolement les différencie, etc.

Les différences de culture religieuse donneraient lieu à de semblables remarques.

Concluons donc que les différences notées par les naturalistes entre les diversesraces humaines nesont point de celles qui caractérisent des espèces, et que. en conséquence, elles ne contiennent aucun argtunenl sérieux contre l’unité d’origine.

III. — Preuves positives de l’unité d’espèce ou d’origine des races humaines

Par preuves positives nous entendons les traits de ressemblance qui rapprochent entre elles les races humaines, leur donnent un air de famille, et les distinguent toutes des espèces animales. Tandis que les différences sont trop faibles pour constituer des espèces distinctes, les ressemblances, au contraire, sont si accentuées, qu’elles ne peuvent convenir qu’à une même espèce. Ces ressemblances sont anatomiques, physiologiques et psychologiques.

I* Hessemblances anatomiques. — A. de Quatre-FAGBS en a donné la signification dans VEspèce humaine, p. 220 : « Dolichocéphale ou brachycéphale, grand ou petit, orthognathe ou prognathe, l’homme quaternaire est toujours l’homme dans l’acception entière du mot… Plus on étudie, et plus on s’assure que chaque os du squelette, depuis le plus volumineux jusqu’au plus petit, porte avec lui, dans sa forme et dans ses proportions, un certificat d’origine impossible à méconnaître. » L’illustre savant parlait ainsi des races préhistoriques comparées aux races actuelles ; les découvertes faites depuis lors ne démentent point son affirmation.

2° liessemhlances physiologiques. — Les phénomènes organiques, tant ceux qui ont trait à la vie de l’individu que ceux qui concernent la conservation de l’espèce, comme la température du corps, la durée moyenne de la vie, les penchants, les instincts. la voix et les cris naturels, les rapports sexuels, la durée de la gestation…, sont identiques dans toutes les races humaines, au lieu qu’ils diffèrent notablement des mêmes phénonxènes observés dans les races animales. De tous ces caractères physiologiques, celui de la filiation ou interfécondité des races est celui auquel on attache le plus d’importance : justement, il est tout à fait favorable à l’unité d’espèce. L’argument s’énonce comme il suit.

On s’accorde généralement à considérer comme étant de même espèce et ayant une origine commune les êtres qui, en s’accouplant, donnent des produits doués dune fécondité continue ; par contre, on tient pour des individus d’espèces différentes ceux dont l’accouplement est stérile, ou dont les produits sont inféconds. La règle ainsi énoncée ne souffi-e que de très rares exceptions. Or les races humaines sont toutes interfécondes : depuis quatre siècles, on a vu s’unir des individus des races les plus disparates, et leurs alliances ont toujours été fécondes ; souvent les métis, fruit de ces unions, sont doués d’une fécondité plus grande que les races pures, ainsi qu’on l’a constaté depuis leGroënland jusqu’au Cap et au Pérou. Par exemple, au xviii’siècle, les mariages entre Hollandais etUottentots avaient produit la race des Griquos ; les Australiens et les Européens créent en Océanie, actuellement, une nouvelle race de métis ; les deux tiers de la population du Mexique sont formés par des métis d’Espagnols et d’Indiens américains. Les races humaines, si profondément séparées des espèces animales par l’interstérilité. portent donc entre elles ce signe généralement reconnu de l’unité d’espèce et de la communauté d’origine.

3" liessemhlances psychologiques. — Les phénomènes d’ordre psychologique varient quant au degré dans les dilTérentes races humaines, et même entre les individus de même race. Mais, dans tous les individus sains, à quelque race qu’ils appartiennent, ils sont de même nature, et toujours les mêmes. Partout, sous toutes les latitudes, l’homme de n’importe quelle race possède le langage articulé, manifeste la notion morale du bien et du mal, croit à des êtres supérieurs et leur rend un culte religieiix.