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INDE (RELIGIONS DE L’ ;

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manuscrits. Je laisserai le plus souvent aux noms propres leur forme primitive, qui fut le sanscrit ; ce ne fut que plus tard qu’on les transcrivit en pâli.

C’est vers le sixième ou cinquième siècle avant l’ère chrétienne que naquit, dans la famille des (’â !.jas, à Kapilavastu, dans la vallée du Gange, le fondateur du Bouddhisme. Son père Çuddhodana et sa mère Mâyàlui donnèrent le nom de Siddiiii itha. Commeles autres familles, la sienne voulut se rattacher à un poète vètlia’e ; elle choisit le fameux Gotama. d’où son surnom âe Gautamo. Quant au titre de Çâkyamiini, qu’il porte également dans l’histoire, et qui signiûe le moine, l’ascète des Çàkyas, il désigne sa qualité, pas autre chose. La mère del’enfanl étant morte peu de jours après sa naissance, il fut élevé par Maîiàprajàpati, sœur de Màyà et seconde femme de Çuddhodana. Lorsqu’il fut en âge, celui-ci confia son fils à des maîtres habiles, dont le principal fut Viçvàmitra. Siddhàrthæutliien tôt fait d’épuiser leur science, si vaste fût-elle, et comme sa passion d’apprendre croissait toujours, son père, craignant de le voir négliger ses devoirs de Ksbatriya, résolut de le marier sans tarder. Le jeune liomme y consentit, mais à la condition qu’on lui trouvât une jeune lille douée de toutes les perfections morales. Cette perle plutôt rare se rencontra dans la personne de la princesse Go^ii, lille de Dandapàni. Celui-ci cependant éprouva quelque scrupule. Il crut qu’un prince, ami des sciences, pouvait difficilement être ami des armes et des autres sports de la caste guerrière, et comme la jeune lille avait cinq cents prétendants, il décida de la donner à celui qui l’emporterait sur ses rivaux à la lutte, au tir de l’arc, à l’équitation, etc. Siddhârtha fut vainqueur partout. Il épousa Gopâ. Çuddhodana se sentit rassuré.

La légende ne s’arrête pas en si beau chemin. Sans souci de contradiction, elle veut que le jeune homme ait été élevé dans un palais somptueux, entouré de tousies genres de séductions, où toutfùt disposé pour flatter ses sens et lui donner le change sur la fragilité du bonheur de ce monde. Son père lui fournit un personnel nombreux, chargé de lui procurer toutes les distractions possibles, mais avec la consigne de ne jamais le laisser sortir du château, ni du parc qui l’entourait, parc d’ailleiU’S vaste comme une province. Cet internement concorde assez mal avec l’histoire du mariage et de ses joutes préliminaires, mais la légende ne se piqua jamais d’une logique rigoureuse,

Fatigué de tourner perpétuellement dans le même cercle, quelque enchanté qu’il fut, le prince trouva le moyen de forcer la consigne i)aternelle, et c’est alors ((u’eurent lieu les quatre sorties si fameuses dans les traditions bouddhiques et aussi, comme nous le verrons, dans l’hagiographieclirétienne. A lai)remière il apprit ce qu’est la vieillesse ; à la seconde ce qu’est la maladie ; à la troisième ce qu’est la mort. Lui qui savait tout, qui avait tout appris, ignorait jusque-là profondément ces trois choses. Chaque fois, il rentrait plongé dans les plus tristes réilexions, à la pensée que c’était là le sort commun des hommes, sans qu’aucun pût s’y dérober. Il comprit que les plaisirs de ce monde étaient éphémères et ne méritaient pas qu’on s’y arrêtât. Dans ime quatrième sortie enfin, il rencontra un ascète dont l’accoutrement singulier le frappa. Il l’aborda etlui demanda cequ’il faisait. L’ascète lui répondit qu’il travaillait à son salut final. Grandement intrigué, Siddluutha l’eniuiena dans son palais et se fit expliquer la doctrine du renoncement.

Précédemment, on ignore à f(uel moment précis de sa vie opulente et retirée, lo dieu Ilrideva lui était apparu pour lepresscrde mettre à exécution le projet qu’il avait formé de se faire religieux et de travailler

à sa sanctification personnelle, ainsi qu’au salut du monde, en appelant tous les hommes à la vie religieuse. La rencontre du moine décida le prince à ne point difl"érer davantage.

La fortune de cette légende fut extraordinaire. Jean, moine de Saint-Saba près de Jérusalem, qui vivait au vu* siècle, passe pour l’auteur d’une rédaction qui nous est parvenue. Six siècles plus tard, Jacques de Voragine, archevêque de Gènes, lui donna une place d’honneur dans sa Légende dorée. Le prince s’appela Josaphat, corruption probable du terme Bodhisattya, l’une des multiples appellations du Bouddha, et le moine convertisseur B aria a ni. Ils furent insérés dans le Martyrologe, à la date du a^ novembre, où ils sont restés, en attendant une nouvelle revision, celle de BenoîtXlV, toute méritoire qu’elle soit, étant demeurée incomplète.

Cependant, comme Siddhârtha, que l’ascète accompagnait, approchait de sa demeure, il apprit la naissance d’un fils. Cette nouvelle l’aflligea, loin de le réjouir : « C’est une chaîne de plus », se dit-il, et il le nomma en conséquence Râhula. Il arriva au palais où il trouva tout en fête. Triste au milieu de l’allégresse générale, il se retira immédiatement dans son appartement. Il attendit le milieu de la nuit, que le silence fût rétabli, et partit sans même dire adieu à son épouse ni embrasser son fils qu’il n’avait pas vu.

Le Lalitavistara ou Dételoppement-des-Jeux, biographie légendaire de notre héros, raconte comment il s’enfuit avec son écuyer Candaka, sur son cheval Kanthaka, à la faveur des ténèbres. Arrivé à une certaine distance, il renvoya écuyer et monture, se coupa les cheveux avec son sabre, échangea ses riches vêtements contre le sayon de peau d’un chasseur, et s’enfonça dans la solitude.

Les plus vieux documents sont plus sobres de détails sur ce départ, et ces détails, moins merveilleux, sont aussi moins invraiseml)lables. D’après eux, Siddhârtha s’éloigna au vu et au su de sa famille, bien que toujours malgré elle. Il se fit couper la barbe et les cheveux et revêtit la robe jaune des ascètes.

Durant sept années, il erra d’ermitage en ermitage, en quête d’un maitre qui lui enseignât la voie du salut, ce (lue, paraît-il, n’avait su faire le premier moine rencontré par lui. Il ne fil que marcher de déception en déception.

Il avait beau interroger les autres dans de longs entretiens, et s’interroger lui-même, au moyen de la méditation, la réponse désirée n’arrivait pas.

Il franchit alors le Gange, non loin de Patna, pour ^oir s’il ne trouverait pas sur la rive droite du fleuve, ce qu’il cherchait inutilement sur la rive gauche. Il traversa une partie du Magadha et parvint au bourg d’Uruvelâ, situé sur la Neranjarà, l’un des nombreux atUuents du Gange. C’est aujourd’hui la Maison du Bouddha, liouddha-Gaya. On y voit un temple fort riche, entretenu aux frais du roi de Birmanie.

Après divers incidents qui n’ont i>as leur place ici, j’arrive à celui qui décida du sort de Siddhârtha. Une nviit que, plus découragé que jamais, il s’était endormi, dans la campagne, au pied d’un figuier ou Pippala, il se sentit tout à coup hiiddlia, c’est-à-dire éclairé, illuminé d’en haut. Il reconnut ((u’il ne renaîtrait plus et sa joiefutintense. Il voulut passercpiatre semaines dans la solitude, avant de commencer à répandre la doctrine du salut. La légende a peuplé cette retraite ])rcliuiinairi’de merveilles. La [jIus fameuse, peut-être, fut la victoire remportée par le nouveau Buddha, ou Bouddha connue on écrit communément, sur Mâni, le Tentateur. Cet esprit malin lui proposa de l’introduire immédiatement dans le