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INSTRUCTION DE LA JEUNESSE

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parmi eux que s’agitent tous les grands problèmes

« le la scolastique ; c’est autour d’eux que viennent, 

de tous les pays de l’Europe, les esprits avides de culture. C’est de leur mouvement que sortira, sur la lin du siècle, ce qui fut la grande Université de Paris.

Outre CCS groni>enu’nls de maîtres, il y avait en <lilïcrents pays, mais surtout près des princes, des comtes, des seigneurs, une foule de précepteurs particuliers, à titre de chapelains, de chanceliers. Ces lioniuies avaient pour mission non seulement de rédiger les pièces publiques, mais encore de surveiller les écoles du voisinage et d’instruire les lils de leurs maîtres et de leurs principaux serviteurs. On en trouve près des comtes de Blois, de Dreux, d’Angers, etc.

En général, le Trivium et le Quadrivium restaient le cadre de l’enseignement secondaire, comme au temps de Charlemagne, mais on l’avait fort étendu. Le Trivium comprenait la grammaire, la rhétorique et la dialectique, c’est-à-dire l’explication des poètes et des prosateurs latins ; quelques-uns savaient admirablement la langue de Rome et même un peu de grec ; on avait qvielques traités <le logique.

Les sciences composant le Quadrivium, c’est-à-dire rarillimélique, la géométrie, l’astronomie et la musique, n’étaient qu’à leur début, parce qu’on se bornait au commentaire des vieux auteurs et l’on ne pratiquait point les méthodes expérimentales. Les esprits étaient alors tournes de préférence vers les questions spiritualistes et religieuses.

Au-dessus de cet enseignement secondaire qui formait la culture générale, se donnait en différents endroits un enseignement supérieur spécial. A Paris, l’on enseignait surtout la dialectique et la théologie, mais aussi le droit canon, le droit civil, et la médecine. Le droit civil était cultivé de préférence encore à Angers, à Toul et à Montpellier ; le droit canon à Orléans et à Auxerre. Mais comme on se jetait sur CCS études lucratives au détriment de la théologie, plusieurs conciles défendirent l’étude du droit dans les cloîtres et dans certaines Universités : tels les conciles de Reims i 131, de Latran i iSg, de Tours 1 163. L’étude de la médecine prit une vogue extraordinaire à Montpellier dès le xii’siècle, comme celle du droit canon à Bologne.

Les femmes elles-mêmes n’étaient pas dépourvues des moyens de s’instruire. Il y avait en général dans les monastères de femmes, comme dans ceux d’hommes, deux écoles, l’une pour les novices et l’autre pour les jeunes filles du monde. Les éludes des premières étaient fort élevées : on se souvient du saoir extraordinaire des abbesses et religieuses appelées d’Angleterre en Allemagne par S. Boniface. On avait pour coutume, sans doute à cause de l’otTice, de n’admettre à la profession que celles qui savaient le latin Les abbayes d’Argenteuil et du Paraclet, où Ton vit la fameuse Héloïse, formaient de véritables savantes en latin, en grecethébreu, capables défaire des vers latins, délire les Pères et de composer des traités de théologie. On cite un certain nombre d’alibesses fort lettrées, comme Matiiilde, abbesse (le Fonlevrault.CÉcii.R, fille de Guillaume le Conquérant, abbesse de la Trinité de Cæn.

Les jeunes filles du monde, du moins celles qui appartenaient à des familles nobles ou aisées, recevaient chez elles, de précepteurs particuliers, comme Héloïse chez le chanoine Fulbert, une instruction assez complète. Nombreuses sont celles dont on cite le savoir. Quant aux jeunes filles du peuple, qvii n’avaient pas de monastères de femmesàleur portée, elles ne restaient pas complètement illettrées, parce qu’elles recevaient les enseignements de la foi.

En principe, l’enseignement était gratuit. L’Eglise recommandait, comme elle l’avait fait sous Charlemagne, de ne recevoir d’autre salaire que les dons de la reconnaissance et de l’amitié. Les moines, soumis au vœu de pauvreté et assurés de leur subsistance, ne demandaient et ne recevaient rien. Guillaume de S. Bénigne avait fait une loi de la gratuité dans ses monastères. Les écoles épiscopales n’exigeaient rien des clercs pauvres, elles en soutenaient même un certain noml>re à Chartres, du temps de Fulbert ; mais leurs professeurs séculiers acceptaient volontiers, même après convention, quelques rétributions en nature ou en argent de ceux qui étaient plus riches. Plusieurs, comme Tuierry ne Chartres et d’autres à Paris, se firent des fortunes avec leurs leçons.

IV. L’instruction, du XIll<’siècle au XVI". — L’enseignement supérieur, dont nous avons vu le développement au xii^ siècle, s’affermit, sur la lin de ce siècle, en devenant une institution officielle sous le patronage des papes et des rois. Les nombreux maîtres qui le distribuaient, sous la surveillance du chancelier de Notre-Dame et du chancelier de Sainte-Geneviève, suivant l’esprit et l’usage du temps, se constituèrent avec leurs élèves en corporation. Le pape Alexandre 111, en i 181, chargea un cardinal, l’archevêque de Rouen, et l’évêque de Paris de leur élaborer des règlements. Le légat Robert de CouRçoN, en I215, revit leurs statuts. Et depuis lors les papes ne cessèrent de protéger l’Université de Paris, qui se déclarait leur fille, en même temps que les rois lui accordaient des privilèges.

Il serait trop long d’énumérer ses fameux professeurs et ses plus illustres élèves. La gloire des uns remplissait le monde entier et les autres accouraient encore plus qu’autrefois de tous les pays. Au xiii" siècle, ceux-ci n’étaient pas moins de 20.000 : au xve siècle leur cortège s’étendait des Mathurins à S. Denis. Ils se distribuaient en 4 Nations selon leurs origines, celle de France, celle de Normandie, celle de Picardie, et celle d’Angleterre. Selon leurs études, ils se partageaient en quatre Facultés : celles de Théologie, de Droit et de Médecine, et au-dessous de ces trois supérieures, celle des Arts. Si la première n’acceptait que des ecclésiastiques, les autres admettaient des laïques.

Au début, les différents maîtres de l’Université de Paris n’avaient pas de siège commun et donnaient leurs leçons partout où ils pouvaient, en pleine rue ou dans des chambres. De même les clercs vivaient comme ils pouvaient à leurs frais, dans des chambres louées aux bourgeois, s’ils étaient riches, ou bien en se faisant serviteurs ou mendiants s’ils étaient pauvres. La triste situation de ces derniers suggéra l’idée de fonder pour venir à leur secours des bourses dans les hôtelleries spéciales où ils trouveraient le gîte, le couvert, la discipline sous la direction d’un proviseur ou principal : ce fut là l’origine des collèges qui se créèrent à partir du xii" jusqu’au xv^ siècle autour de l’Université. On en compte plus de 78, érigés successivement par des bienfaiteurs ecclésiastiques ou laïques à l’intention d’un certain nombre de boursiers appartenant à des pays désignés ou réunissant certaines conditions déterminées. Les plus famejix furent, après le collège des Pauvres écoliers, celui de Sorbnnnc fondé par Robert de Sorbon, confesseur de saint Louis, en 1250 et celui de Harcourl en lySo, de Navarre en lioli, de Montaigu en iSi^, du Plessis en 1822 ; signalons encore ceux des Dix-huit, XII siècle, des Trésoriers en 1268, de Caivi en 1271, des Chollets en 1291, de Treguier en 1325, des Lombards en 1334, de Beauvais, de Lisieux