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DANTE ET GŒTHE.

vençal, le sicilien, se confondent mais les Histoires florentines des deux Malaspini (tirées en grande partie de ces registres nommés Ricordanze ou les chefs de maisons patriciennes se transmettaient de père en fils, selon l’usage du patriciat romain, les événements dont se composait la tradition domestique) et la chronique piquante de Villani sont des œuvres italiennes. Enfin paraît Dino Compagni, appelé tour à tour le Salluste ou le Thucydide de la Toscane, plein de force et de douceur, d’élégance et de précision, et dont l’œuvre tout entière est animée des deux grands sentiments qui pénètrent de part en part la Comédie dantesque, l’indignation et la pitié.

C’est, du milieu de ce groupe d’hommes éminents, dont les uns le précèdent et les autres lui survivent, que se détache et vient à nous en pleine lumière la figure sculpturale de Dante Allighieri.

Tout annonce à ses contemporains un homme extraordinaire. Un songe symbolique a promis à sa mère enceinte un fils glorieux. Il naît sous la constellation des Gémeaux. Le sang du patriciat romain qui coule dans ses veines donne à son visage un caractère de force et de fierté. Il a, de la race toscane, le front vaste, le nez aquilin, les yeux grands. Son visage est allongé ; sa démarche et son geste sont graves ; sa parole est rare et réfléchie. Le charme même de l’enfance et de la jeunesse revêt en lui quelque chose de solennel, qui semble comme la muette expression d’un grand destin. C’est ainsi que nous le montre son ami et son condisciple Giotto, dans la fresque du Bargello.