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HISTOIRE

soins à sa mère, qui vivait fort retirée depuis la mort de ses deux autres enfants, l’attirait seul à Paris. Madame Cavaignac chérissait son fils et recevait de lui tous les respects de la piété antique. C’était à cause d’elle et par son entremise uniquement qu’il entretenait des rapports avec le parti républicain, n’ayant personnellement aucun goût ni pour le journalisme, ni pour la vie parlementaire. À son dernier voyage, en 1847, il indisposa même fortement quelques-uns des principaux rédacteurs du National en repoussant l’offre qu’ils lui faisaient, au nom du parti républicain, de le rendre éligible. Sa fierté de soldat ne comprenait pas ces sortes de compromis politiques et s’en offensait. Il fondait, d’ailleurs, un médiocre espoir dans cette campagne des banquets qu’il voyait s’ouvrir par une alliance ambiguë antipathique à sa droiture les difficultés extrêmes qui chaque jour menaçaient l’existence de la Réforme le confirmaient dans la pensée que la République comptait trop peu de partisans pour ne pas être absolument impossible en France.

Quand la révolution de Février éclata, Eugène Cavaignac était maréchal de camp et commandait en Algérie la subdivision de Tlemcen[1]. Le gouvernement provisoire n’eut garde d’oublier un officier de ce nom et de ce mérite. L’un de ses premiers décrets éleva Cavaignac au grade de général de division et le nomma gouverneur général de l’Algérie[2]. C’était dans les circonstances critiques où l’on se trouvait une marque de confiance signalée. L’on n’était pas à Paris sans quelque doute sur la soumission de la colonie.

Un homme d’un talent militaire que de brillants succès

  1. On raconte que, en apprenant a Oran la nouvelle de la proclamation de la République, apportée par un bâtiment espagnol, le général Cavaignac s’écria : « La République ! c’est à six mois d’ici l’entrée à Paris d’Henri V ! »
  2. Les titres de général de division et de général de brigade avaient été rétablis par le gouvernement provisoire, vu « les glorieux souvenirs que rappelaient au peuple français et à l’armée les dénominations données sous la République et l’empire aux officiers généraux. »