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HISTOIRE

diatement les projets des travaux le plus rapidement exécutables. Il y avait donc lieu d’espérer que la situation critique où l’on s’était si témérairement engagé ne se prolongerait pas et qu’une sérieuse reprise des travaux mettrait fin à des désordres dont le caractère devenait de jour en jour plus alarmant pour la paix publique. L’état dressé, dans la réunion de l’Hôtel de Ville, du nombre approximatif des ouvriers sans travail, donnait 17,000 hommes. Personne alors ne pensait que ce chiffre dût beaucoup s’accroître ; généralement on le tenait pour exagéré. Cependant, vers le 15 mars, le chiffre réel s’élevait déjà à plus de 49,000 hommes.

L’organisation adoptée par M. Émile Thomas était toute militaire. L’administration, divisée en quatorze arrondissements correspondant aux quatorze municipalités de Paris et de la banlieue, se composait de quatre sous-directeurs. Huit commissaires spéciaux étaient chargés de maintenir l’ordre ; quarante-huit agents de recensement révisaient les listes ; douze inspecteurs, sous les ordres d’un inspecteur général, surveillaient chacun un arrondissement. On inventa pour les artistes nécessiteux, peintres, sculpteurs, comédiens, dessinateurs, qui étaient venus demander le bénéfice du décret par lequel le gouvernement provisoire garantissait le travail à tous les citoyens, l’emploi d’agents payeurs rétribués à raison de 4 francs par jour[1]. M. Émile Thomas eut aussi la pensée de former à Monceaux une garde spéciale composée des anciens gardes municipaux, au nombre de mille environ, qui n’avaient point cessé de toucher leur solde. Mais le projet ayant transpiré, les ouvriers murmurèrent pour prévenir des rixes fâcheuses, on décida d’envoyer les gardes municipaux à Beaumont-sur-Oise où ils formèrent, sous le commandement de leurs anciens officiers et sous-officiers, quatre compagnies que l’on occupa à l’extraction du minerai et qui, après les

  1. Il y eut jusqu’à 800 de ces agents.