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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

polonais qui s’étaient dissous, à l’exception de ceux qui devaient être incorporés dans l’armée, s’irritait du voisinage des camps. Croyant avoir bon marché de ces recrues nouvelles, les Prussiens attaquèrent inopinément le camp de Ksionz, et, après une lutte terrible, où les paysans armés de faux et de fourches se battirent héroïquement, les Polonais cédèrent au nombre, la ville de Ksionz fut prise et réduite en cendres. Le major Dembrowski perdit la vie ; des cruautés atroces furent exercées sur les paysans par la soldatesque[1]. À peu de jours de là, Mieroslawski, attaqué par le général Blumen au camp de Miloslaw, prit une revanche signalée ; mais, malgré des efforts prodigieux, il ne put soutenir longtemps une lutte trop inégale ; le général Pfuel, commissaire du roi en remplacement du général Willisen, entra le 5 mai à Posen, y proclama la loi martiale et fît enfermer Mieroslawski dans la citadelle. Une nouvelle ordonnance, qui incorporait arbitrairement Posen et dix-huit districts à la Confédération allemande, mit à néant les espérances de la Pologne.

Cependant les colonnes d’émigrés partis de France et d’Allemagne arrivaient à Breslau, à Magdebourg ; un grand nombre étaient déjà à Cracovie.

En y voyant entrer les régiments autrichiens qui s’étaient concentrés sans bruit, depuis quelque temps, autour de la ville, le comité national préposé pour veiller à la chose publique s’alarma ; il se rendit auprès du commissaire autrichien pour lui demander des explications au sujet des émigrés. Le commissaire fit des réponses évasives ; le soir même, on apprit qu’une colonne d’émigrés venait d’être arrêtée à la frontière, et le bruit se répandit qu’ils allaient être livrés à la Russie. À ce bruit, le peuple et la garde nationale courent aux armes, l’insurrection éclate ; mais

  1. Afin de reconnaître ces paysans s’ils venaient à s’insurger encore, on leur coupait les oreilles et on leur faisait des marques sur les bras avec du nitrate d’argent.