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Page:Agoult - Histoire de la révolution de 1848, tome 2.djvu/271

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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

en uniforme qui sont répandus pêle-mêle dans l’hémicycle, et qui occupent une partie des places des représentants, se rangent en cordon autour de la salle ; plus de deux cents représentants reprennent leurs siéges. On va commencer à délibérer quand tous les yeux se tournent vers la porte d’entrée : c’est M. de Lamartine qui paraît suivi de M. Ledru-Rollin ; il se dirige vers la tribune, le silence s’établit. M. de Lamartine demande à l’Assemblée de voter les remercîments de la France à la garde nationale ; il flétrit, mais avec beaucoup de ménagements, les scandales qui ont un moment déshonoré l’enceinte de la représentation nationale puis il annonce qu’il va se réunir à ses collègues de la commission exécutive et se rendre avec eux à l’Hôtel de Ville. « Dans un moment pareil, dit-il, la place du gouvernement n’est pas dans le conseil ; elle est à votre tête, gardes nationaux ; dans la rue, sur le champ même du combat ; à cette heure, la plus belle tribune du monde, c’est la selle d’un cheval ! »

Après ces mots couverts d’applaudissements, les tambours battent la marche. On amène un cheval à M. de Lamartine, un autre à M. Ledru-Rollin ; quelques représentants et un grand nombre de gardes nationaux les suivent. Le régiment de dragons, caserné sur le quai d’Orsay et commandé par le colonel de Goyon, prend la tête du cortége aux cris frénétiques de : Vive l’Assemblée nationale ! il emmène six pièces de canon. On s’avance rapidement et sans obstacle jusqu’à la hauteur de la place Saint-Michel. Là, on se voit arrêté par une masse compacte de peuple, au milieu de laquelle un détachement de Montagnards et de gardes Républicains se dispose à la résistance. On entend dire dans cette foule que l’Hôtel de Ville, occupé par le nouveau gouvernement, est formidablement gardé. On voit aux fenêtres des maisons des hommes armés de carabines qui n’attendent qu’un signal pour faire feu ; mais le colonel de Goyon commande un mouvement de division qui montre les canons à la foule. À cette vue les Montagnards se re-