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Page:Agoult - Histoire de la révolution de 1848, tome 2.djvu/318

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HISTOIRE

avait des cadres pour les anciens officiers de l’Empire, n’ayant pas obtenu d’autorisation officielle, avait en apparence cessé d’exister ; mais elle ne fit en réalité que se transformer. Une librairie napoléonienne s’était ouverte vers cette époque. On avait publié successivement, à Londres et à Paris, la Revue de l’Empire, le Capitole, la Colonne, l’Idée napoléonienne.

À partir du 24 février, la propagande, devenue plus libre, se multiplia, mais elle changea de caractère. La fraction la plus éclairée du parti bonapartiste, les hommes qui n’étaient pas éblouis par des souvenirs de jeunesse et par le regret des gloires impériales, comprirent que le pays était franchement entré dans le mouvement républicain, et qu’il serait téméraire de venir se heurter à la popularité du gouvernement provisoire ; tout ce qu’on pouvait faire, pensèrent-ils, c’était d’épier ses fautes et plus tard celles de l’Assemblée nationale, afin d’en tirer avantage selon que la circonstance le comporterait.

En conséquence, on contint l’impatience des zélés ; il ne fut plus question d’un empereur, mais seulement d’un chef populaire pour la République. On ne parla plus des droits au trône que Louis Bonaparte tirait de sa naissance, mais des devoirs que lui créait son nom envers le peuple ; on vanta sa loyauté chevaleresque et sa probité antique. On dit que, depuis vingt ans, il était l’espoir de la France ; lui seul, assurait-on, y pourrait fonder une démocratie sans anarchie[1], et l’on tâchait d’amener à cette idée les républicains que ne satisfaisait pas la politique du gouvernement. Le général Piat, devenu colonel d’une légion de la banlieue, M. Aladenise, nommé chef de bataillon dans la garde mobile, MM. Abattucci, Vieillard, représentants du peuple, d’autres encore communiquaient des correspondances de Louis Bonaparte, toutes empreintes des sentiments les plus démocratiques. M. Edgard Ney pratiquait les

  1. Voir, entre autres, le Napoléon républicain.