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MAURIN DES MAURES

commande même de détourner en faveur de Maurin une part des éloges qui lui reviennent. C’est Crouzillat lui-même qui vous dit ici : « Honneur à Maurin des Maures ! »

Ce dernier mot était à peine prononcé qu’une voix sonore s’élevait dans l’auditoire. C’était celle de Pastouré :

— Noum dé pas Dioù ! cria l’homme qui ne parlait jamais en public, c’est tapé !

Personne ne sourit.

La voix de Pastouré résumait le sentiment unanime.

Le petit discours avait donc produit grand effet. Et Maurin retenait, au coin de ses yeux, une larme qui se décida à couler, lorsqu’à la sortie du cimetière, tandis que toutes les mains pressaient la sienne, il vit venir, boitant avec sa légèreté élégante, le vieux savant Rinal qui, de loin, lui fit, de sa canne levée, un signe d’amitié.

Le discours du préfet fut commenté pendant plusieurs jours. Alessandri qui, le lendemain, lut ce discours dans les journaux de Toulon, se sentit distancé et résolut de faire à Tonia sa déclaration amoureuse le plus tôt possible. Et en pensant à la manière dont il s’y prendrait, il fourbissait avec rage les boutons de son uniforme et la plaque de son ceinturon.

— C’est égal, se disait Pastouré, je n’aime pas les honneurs ; plus on en a, plus on a d’envieux et de méchants à ses derrières. Le préfet est content, mais le gendarme est vexé. Le préfet est dans la préfecture et le gendarme vit sur les routes ; je ne rencontre jamais le préfet, je peux rencontrer le gendarme tous les jours ; ça me tourmente… Enfin, qui vivra verra !