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MAURIN DES MAURES

désir, voyait autour de sa tête des frisons de cheveux noirs échappés à sa coiffure, et qui frémissaient, tout irisés, dans la clarté éblouissante du ciel.

— Et quel autre profit voudriez-vous ? dit-elle avec malice, car elle songeait encore à la chanson de la poulette.

Puis, avant qu’il répondît, elle ajouta gaiement, par manière gentille :

— C’est joli, ça ! n’avez-vous pas honte, de demander salaire pour avoir bien agi ?

— Mon salaire bien gagné, dit Maurin, étendant vers elle les bras et la saisissant par la taille, ce sera un bon baiser, rien qu’un !

Elle se débattait sans donner contre lui trop de force et sans se fâcher.

Lui. la tenant toujours par la taille, continua :

— Voyons, une supposition. Maurin des Maures n’aurait pas poussé son cri qui fait peur aux mauvaises gens, qu’est-ce qui te serait arrivé ?… On tremble d’y penser, dis, ma belle ? Ce n’est pas d’un baiser que tu courais le risque mais de beaucoup, je pense, et non pas d’un seul homme, pechère, et de telles gens encore, que, d’y penser, la rage m’en vient, bon Dieu ! Songe donc ! Et pour avoir été sauvée d’un pareil malheur, un baiser, un seul, que tu donneras à un brave homme, à un honnête homme, voyons, sera-ce payé trop cher ?

Debout, il la tenait par derrière à pleins bras, largement, et ses deux mains s’étaient croisées sur la jeune poitrine tendue et battante. Elle ne détourna pas la tête… Sans doute, elle pensait, elle aussi, qu’il méritait, le beau et brave chasseur, ce gentil paiement de sa bravoure… Ce n’était pas un bien gros larcin fait au