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MAURIN DES MAURES

Antonia ne raisonnait pas de même, mais elle n’avait pu encore placer un seul mot. Les deux hommes, les deux rivaux, étaient trop animés. Elle guettait l’occasion d’intervenir.

En attendant, elle les examinait et l’attitude de Maurin la frappait d’admiration.

Maurin posa sur la table son verre vide, et regardant le gendarme :

— Tu ne refuseras pas de me dire, Alessandri…

— Ne me tutoyez pas ! dit le gendarme.

— C’était par amitié et non par mépris, gendarme, mais du moment que ça vous contrarie on vous dira : « tu » ! je m’y engage.

La belle fille ne put s’empêcher de rire de la figure du gendarme vexé.

Alessandri exaspéré cria :

— Allons, c’est assez causé ! suivez-moi.

— Comment avez-vous su que j’étais ici, gendarme ?

— Il me suffit de vous y trouver.

— Encore une question. Avez-vous expliqué au juge ce que c’était que cet homme, ce Grondard, qui a été si justement tué ?… Lui avez-vous dit, au juge, que ce Grondard était une bête dangereuse, un homme méprisé de tout le monde, accusé de toutes sortes de mauvaises actions par la renommée ? Lui avez-vous dit enfin que, depuis longtemps, les gardes et les gendarmes auraient bien fait de lui loger eux-mêmes une balle dans la tête, s’ils s’occupaient mieux de leurs affaires ? Lui avez-vous dit tout cela, au juge ?

— J’ai dit au juge ce que j’avais à lui dire. Vous lui parlerez de Grondard comme vous voudrez. Moi je n’ai qu’à vous arrêter et je vous arrête.