Page:Aicard - Maurin des Maures, 1908.djvu/421

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
403
MAURIN DES MAURES

est bête, mauvais, vilain, mais n’est-il pas admirable que de tout ce chaos se dégage en somme une idée d’humanité supérieure, un simple petit espoir, mais lumineux, une vision d’homme plus doux, plus fort, plus civilisé ? Et ces bourgeois qu’on accuse — je les accuse — qu’on méprise — je les méprise — n’est-il pas magnifique, après tout, que ce soit eux qui se fassent les instruments de l’évolution du prolétariat à laquelle ils perdront quelque chose de leurs avantages ?

— Ils n’y perdent rien, dit timidement M. Cabissol ; ils y gagnent momentanément le pouvoir. Cette compensation leur suffit.

— Un pouvoir qu’ils emploient à préparer leur chute de demain !… Vous m’agacez à la fin.

« De quel droit suspectez-vous leur bonne foi ? Pourquoi pas la mienne ? Qu’ai-je à gagner, moi par exemple, à l’avènement de Maurin, de Pastouré et de tous les prolétaires de France ? Rien. Je professe une opinion qui les sert et qui peut me desservir, puisque je ne brigue ni le mandat de député ni celui de conseiller municipal. Et pourquoi suis-je avec eux ? Parce que je les aime, tout bêtement, et parce que j’aime la justice.

— Oh ! vous ! vous !… vous êtes un saint laïque, grogna Cabissol.

— Noum dé pas Diou ! dit Maurin, vous me faites venir la chair de poule, monsieur Rinal, à force de bien parler. Ah ! si nous en avions « de comme vous » pour les envoyer là-haut, on te la referait, la France ! Qu’en dis-tu, Pastouré ?

— Je suis là que je me le pense, dit le colosse-enfant.

M. Cabissol semblait réfléchir.

— Alors, reprit-il enfin après un long silence, vous