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MAURIN DES MAURES

Quand Pastouré raconta ces choses, le soir même, chez M. Rinal, — Cabissol, ému d’abord, répondit après un silence :

— Cela me semble impossible ; je ne peux pas admettre que Maurin soit mort ainsi ! d’une façon si contraire à son caractère, à la logique de sa vie. Un Maurin ne se laisse pas surprendre par un Grondard. Il l’entend venir, il le déjoue.

— Vous oubliez que plus d’une parmi de très illustres existences s’est terminée par l’accident ou par l’assassinat, répondit tristement M. Rinal.

— Les accidents sont logiques la plupart du temps, s’écria Cabissol, ils arrivent à ceux qui les attirent. Quant à l’assassinat, il ne réussit jamais avec un Napoléon ! Oui, oui, il y a des hommes plus grands que la destinée. Et Maurin était de ceux-là. Maurin n’est pas mort !

— Vous oubliez que Maurin n’est pas un personnage de roman. Et quand il ne serait pas autre chose, pourquoi son histoire ne se terminerait-elle pas au plus beau moment ? en vertu de quelle esthétique ? Si le roman doit peindre la vie telle qu’elle est, il doit pouvoir s’interrompre brusquement. Et quant à la vie elle-même, elle n’a cure des procédés du romancier !

M. Cabissol protesta :

— Rien ne m’ôtera de l’idée qu’il n’est pas mort. Il a trouvé son île d’Elbe, voilà tout ; il reviendra, ne fût-ce que pour cent jours.

Il y eut un silence :

— Je l’aimais, cet homme-là, ajouta-t-il.

— Et moi donc ! dit M. Rinal que l’émotion gagnait de plus en plus.