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LA FIÈVRE D’OR.

moi qu’un étranger, surtout après la manière péremptoire dont il a refusé les avances d’amitié et les offres de service de mon père.

— Vous avez parfaitement raison, señorita ; croyez bien que j’apprécie à toute sa valeur la délicatesse de votre procédé.

— Cependant, reprit-elle d’une voix insinuante et légèrement railleuse, je vous avoue que je ne serais pas fâchée de me retrouver face à face avec cet homme étrange, ne fût-ce que pour juger si je me suis trompée dans l’opinion que je me suis faite de lui.

— Don Luis, madame, répondit complaisamment l’Espagnol, est un vrai caballero, bon, noble et généreux, toujours prêt à venir en aide de sa bourse ou de son épée à ceux qui réclament son appui ; depuis que j’ai l’honneur de vivre en sa compagnie, j’ai été maintes fois à même d’apprécier la grandeur de son caractère.

— Je suis heureuse de ce que vous m’apprenez, señor, car je vous avoue que ce caballero m’avait laissé une fort mauvaise impression, sans doute à cause de la sauvagerie avec laquelle il s’est séparé de nous.

— Cette mauvaise impression était injuste, madame ; quant à la sauvagerie que vous lui reprochez, hélas ! ce n’est que de la tristesse.

— Comment ! s’écria-t-elle vivement, tandis qu’une teinte rosée envahissait tout à coup son front, de la tristesse, dites-vous ? ce gentilhomme serait-il malheureux ?

— Qui ne l’est pas ? répondit don Cornelio avec un soupir ?