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LA FIÈVRE D’OR.

— En avez-vous quelques-uns en vue ?

— En ce moment ?

— Oui.

— Ma foi, non, le ganado devient hors de prix, la découverte de l’or en Californie y a fait affluer une quantité énorme d’aventuriers de tous pays. Vous savez ce que sont les gringos[1], il leur faut absolument de la viande ; ces misérables hérétiques sont tellement gloutons, qu’ils ne sauraient s’en passer, de façon qu’ils ont absorbé tout le ganado qu’ils ont pu se procurer aux environs, et maintenant ils sont contraints d’en faire venir de cent et deux cents lieues ; vous comprenez que cela fait augmenter le ganado dans des proportions gigantesques.

— C’est fâcheux.

— Et tenez, général, il n’y a qu’un instant, en mettant mon cheval au corral, j’ai vu le plus magnifique troupeau de novillos qui se puisse imaginer ; il est évident que ces pauvres animaux ont au moins fait cent lieues, tant ils paraissent fatigués.

Doña Angela jeta un regard à la dérobée à sa camérista debout derrière elle.

— On m’en a parlé, dit négligemment le général, ce sont des bestiaux que l’on conduit, je crois, à San-Francisco.

— Que disais-je il n’y a qu’un instant ? s’écria le capitaine en frappant du poing sur la table ; caraï ! si on les laisse faire, ces gringos endiablés, avant dix ans auront dévoré tous nos bestiaux.

  1. Terme de mépris employé pour désigner les protestants.