Page:Aimard - La Fièvre d’or, 1860.djvu/272

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
265
LA FIÈVRE D’OR.

montons, il ne faut pas qu’ils se doutent que nous avons des soupçons ; examine attentivement ces individus, lorsque tu te trouveras en leur présence, et je suis certain que tu te rangeras à mon opinion après ; viens, remontons.

Louis ne répondit pas.

Ils remontèrent ; Valentin quitta son ami dès qu’ils furent sur le pont.

— Je retourne à terre, dit-il, tu me trouveras sur la plage.

Puis le chasseur s’affala dans sa pirogue que Curumilla, afin de ne pas être remarqué, avait fait filer à l’arrière, sous le couronnement ; l’embarcation déborda pour regagner la plage, juste au moment où le colonel et don Antonio accostaient à tribord et mettaient le pied sur le pont du navire.

Nul peuple ne possède à un degré aussi éminent que le peuple mexicain les raffinements de la politesse et de la plus gracieuse galanterie ; ils savent, par leurs manières félines et doucereuses, lorsqu’ils le veulent, séduire et charmer les personnes qu’ils ont intérêt à tromper.

Malheureusement, malgré tous les efforts qu’ils firent et toutes les câlineries qu’ils employèrent pour convaincre don Luis de leur sincérité et de leur profond attachement pour lui, don Antonio et son compagnon avaient des dehors si peu attrayants, on lisait si bien sur leurs visages les honteuses passions qui les minaient, qu’ils en furent pour leurs frais d’amabilité.

Ainsi que Valentin l’en avait averti, à l’approche de ces deux hommes le comte avait malgré lui éprouvé un sentiment de répulsion tellement fort