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LA FIÈVRE D’OR.

prétextes, plus futiles les uns que les autres, je suis retenu au port. Comprenant combien l’inaction peut être nuisible à ma compagnie, je fais démarche sur démarche auprès du commandant général et auprès de vous-même ; à toutes mes lettres il est répondu par des fins de non recevoir.

— Continuez.

— Fatigué de cette position anormale, je parviens à obtenir mes passeports pour partir enfin aux mines ; alors, qu’arrive-t-il, je reçois de vous, général, un pli qui m’intime l’ordre de ne pas sortir de Guaymas.

— Très-bien, allez.

Don Luis, confondu par l’impassibilité de son interlocuteur, dont le visage demeurait calme et la voix tranquille, sentit malgré lui un commencement de colère fermenter au fond de son cœur.

— Enfin, général, dit-il en élevant la voix, j’ai le droit de vous demander nettement quel jeu nous jouons.

— Mais un jeu bien simple, mon cher comte, je vous le répète, vous pouvez, si vous le voulez sérieusement, avoir tous les atouts dans la main.

— Je vous avoue que je ne vous comprends pas du tout.

— C’est impossible !

— Sur l’honneur ! je vous aurai la plus sincère obligation de m’expliquer clairement ce qui se passe, car je vous certifie que je suis dans un chaos dont je désespère de sortir jamais.

— Cela dépend de vous seul.

— Pardieu ! général, vous conviendrez que vous vous moquez de moi ?

— Pas le moins du monde.