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LA FIÈVRE D’OR.

— Où diable avez-vous pris ce drôle ? fit-il d’une voix rude ; il n’a pas un ochavo sur lui. Pendez-le, et que tout soit dit

— Oui, observa le lieutenant, il n’est bon qu’à cela, puisqu’il a été assez stupide pour venir se jeter à l’étourdie dans des filets tendus pour prendre un plus noble gibier.

— Permettez, excellence, observa un des bandits en saluant respectueusement, cet homme n’a pas été pris par nous.

— Alors, comment est-il ici ?

— Parce que, illustre capitaine, il nous a instamment demandé à être conduit en présence de Votre Seigneurie, ayant à vous révéler des choses de la dernière importance.

— Ah ! fit le chef. Mais, ajouta-t-il, je reconnais ce quidam : c’est, si je ne me trompe, le huesped du meson de San-Juan.

Le prisonnier s’inclina affirmativement.

C’était en effet le digne Saccaplata lui-même. Après avoir expédié son criado (domestique) et pendant que don Cornelio était auprès du colonel, l’hôtelier avait réfléchi que l’on ne fait bien ses affaires que soi-même, et comme probablement il avait à cœur que celle-là réussît, il s’était mis à la poursuite du peon, qu’il n’avait pas eu de peine à atteindre, car le pauvre diable ne se souciait que fort peu d’accomplir la mission dont son maître l’avait chargé.

Saccaplata l’avait renvoyé au meson, et tandis que le peon retournait tout joyeux sur ses pas, il avait tenté lui-même l’aventure.

— Ah çà ! observa le lieutenant, est-ce que le