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LA FIÈVRE D’OR.

Don Sebastian, d’après les soupçons que lui avait suggérés don Cornelio, ne se souciait nullement, ayant avec lui une jeune fille, de se mettre en route avant le lever du soleil, surtout se trouvant dans l’obligation de traverser la gorge que nous avons décrite dans le précédent chapitre, où il était excessivement facile de tendre une embuscade.

Cette gorge, comme nous l’avons dit, nommée la barranca del mal paso, était fort mal famée. Depuis quelques mois, plusieurs meurtres s’y étaient accomplis, et le redoutable chef de salteadores el Buitre, passait pour y avoir établi son quartier général.

Nous savons à quoi nous en tenir sur cette dernière assertion.

Bien que doué d’un courage à toute épreuve, le colonel ne se souciait nullement d’aller pendant les ténèbres se jeter dans un guêpier, dont il aurait été impossible de sortir sain et sauf.

À la lumière du soleil, il avait meilleur espoir, pour deux raisons : c’est que les domestiques qui l’accompagnaient étaient de vieux soldats aguerris au feu et fort attachés à sa personne ; la seconde, c’est que les brigands mexicains sont généralement fort lâches, et que dès qu’ils trouvent une résistance sérieuse de la part de ceux qu’ils attaquent, ils renoncent immédiatement à la partie.

Ces deux raisons d’abord, et ensuite la crainte d’effrayer sa fille et de l’exposer inutilement à des dangers impossibles à neutraliser pendant l’obscurité, engagèrent donc le colonel à laisser partir devant lui tous les autres voyageurs du meson ; ceux-ci ne tardèrent pas, en effet, à quitter