Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/424

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tout aussi peur que lui, il reprit son sang-froid et profita habilement de cette disposition des esprits, afin de mettre sa responsabilité à couvert et de ne paraître agir que poussé par la volonté de tous.

— Caballeros, dit-il, vous avez entendu cet homme, vous avez compris ainsi que moi les menaces qu’il a osé nous faire. Un tel affront demeurera-t-il impuni ? Vous laisserez-vous ainsi braver au sein même de la ville par une poignée de misérables sans chercher à leur infliger la correction qu’ils méritent ? Aux armes ! caballeros, et faisons-nous tuer bravement s’il le faut plutôt que de laisser cette tache au vieil honneur espagnol que nous ont légué nos pères.

Cette chaleureuse allocution produisit l’effet qu’en attendait le général, c’est-à-dire qu’elle redoubla, s’il est possible, la terreur des assistants qui connaissaient de longue date la couardise de leur chef, et savaient combien peu ils pouvaient compter sur lui. Cette subite ardeur guerrière leur sembla tellement insolite et surtout si mal arrivée, qu’ils le pressèrent de souscrire sans retard aux conditions imposées par le sachem.

C’était tout ce que désirait le gouverneur. Il fit dresser un procès-verbal de la séance, sur lequel furent constatés les efforts tentés par le général afin d’obliger les assistants à une résistance à laquelle il lui avait été impossible de les contraindre ; puis, lorsque ce premier document eut été signé par tous les membres du conseil, le général le mit dans sa poche.

— Puisque vous l’exigez, dit-il, que rien ne peut vous engager à une résistance honorable, je vais moi-même me rendre à la prison, afin d’éviter toute espèce de malentendu, et faire ouvrir les portes à don Miguel Zarate et au général Ibañez.