Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/125

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qu’aux calomnies effroyables qu’il débitait contre vous, je le couchai en joue et l’abattis raide mort.

— Ah ! le misérable ! s’écria le Mayor, en proie à une rage indicible, il a été justement châtié. Merci, Navaja, merci, mon ami, ce service me rend éternellement votre débiteur.

— J’ai fait mon devoir, Mayor, voilà tout.

— Peut-être ; mais comment cela a-t-il fini ?

— Par un tumulte effroyable, et une chasse désespérée ; mais, blotti heureusement au plus épais du feuillage, j’échappai à toutes les recherches ; et, lorsque les coureurs des bois, fatigués de leur inutile poursuite, eurent regagné la clairière, je m’évadai au plus vite et sans regarder derrière moi, je vous le jure…

— Vous avez risqué votre vie pour moi, je ne l’oublierai pas ; mais le procès-verbal, que, dites-vous, on a dressé sous la dictée de ce misérable traître, qu’est-il devenu ? Le savez-vous ?

— Je l’ignore, Mayor ; je vous avoue même que je n’y ai pas songé ; peut-être aurais-je pu rester encore dans ma cachette, mais la nuit s’avançait, je craignais que les coureurs des bois ne se ravisassent et ne me surprissent dans mon arbre, où j’aurais fait une très sotte figure, et je ne pensai qu’à fuir au plus vite

— Vous avez eu raison ; mais ces maudits chasseurs me le paieront, je vous le jure ; je tirerai d’eux une vengeance exemplaire.

— Me permettez-vous de vous parler franchement, Mayor ?

— Oui, parlez.

— Eh bien, à mon avis, je crois que vous ferez bien, surtout en ce moment, de ne pas vous attaquer à eux. Vous avez déjà une rude besogne sur les bras, ne vous en mettez pas une autre qui, peut-être, serait plus rude encore. Ces chasseurs sont braves, nombreux, leur nombre s’accroît chaque jour, à cause des grandes chasses d’automne ; ils sont neutres en ce moment ; ne vous en faites pas des ennemis. Qui sait ? si vous les attaquiez, peut-être