Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/426

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— De vous, Armand.

— En effet, ma mère, j’aurais dû le deviner tout d’abord, vous ne vivez et ne pensez que pour vos enfants, et votre joie suprême est de les voir heureux près de vous. Mais, j’y songe, aurais-je été assez malheureux pour mériter vos reproches ? La vie que je mène est peut-être, dans votre pensée, un peu trop mondaine. S’il en est ainsi, ma mère, veuillez, à l’avance, agréer toutes mes excuses, et être assurée que je ferai tout pour vous satisfaire.

— Je n’ai aucun reproche à vous adresser, mon fils, répondit-elle en souriant avec tendresse ; votre conduite est celle d’un gentilhomme jaloux de l’honneur de son nom. Il s’agit de vous, je le répète… et d’une autre personne, ajouta-t-elle avec un fin sourire, en lançant un regard de côté sur Vanda, qui, la tête baissée et le front rougissant, semblait travailler avec ardeur à sa broderie.

— Je ne vous comprends pas, ma mère, dit le jeune homme avec un léger tremblement dans la voix.

— En êtes-vous bien sûr, mon fils ? reprit-elle avec une légère pointe de raillerie ; mais redevenant presque aussitôt sérieuse, car elle adorait ses deux chers enfants : Je sais tout ! ajouta-t-elle.

Armand baissa la tête sans répondre.

L’aiguille à broder s’échappa des doigts tremblants de Vanda.

La comtesse examina pendant un instant les deux beaux jeunes gens avec une expression d’indicible tendresse mêlée de regret.

— Pourquoi prendre ainsi devant moi une attitude qui ne convient qu’a des coupables, mes enfants ? reprit-elle avec une angélique douceur ; de quoi pourrais-je me plaindre ? quels reproches aurais-je à vous adresser ? Ce qui arrive devait arriver tôt ou tard. Élevés ainsi l’un près de l’autre, vous vous êtes aimés, cela était fatal. Avant vous-mêmes, j’avais deviné ce mutuel amour ; j’en suivais dans mon cœur les développements, et, vous le dirais-je ? j’en étais et j’en suis heureuse…