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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

cela arrive toujours en pareille circonstance, laissé séduire par ce qui flattait le plus ses goûts et ses instincts et n’avait pris des coutumes des blancs que ce qui devait achever et compléter sa dépravation précoce.

Aussi, lorsqu’il avait été de retour dans sa tribu, ses mœurs et son langage s’étaient tellement trouvés en désaccord avec ce qui se faisait et ce qui se disait autour de lui, qu’il n’avait pas tardé à exciter le mépris et la haine de ses compatriotes.

Ses ennemis les plus acharnés avaient été naturellement les prêtres ou du moins les sorciers qu’il avait maintes fois cherché à tourner en ridicule.

Une fois que le Visage-de-Singe se fut mis à dos le parti tout-puissant des sorciers, c’en fut fait de ses projets ambitieux ; toutes ses menées échouèrent, une sourde opposition renversait constamment les projets qu’il formait au moment même qu’il croyait les voir réussir.

Pendant assez longtemps, le chef, ne sachant à qui s’en prendre, se tint prudemment sur la défensive, surveillant activement les démarches de ses ennemis, attendant, avec cette patience féline qui faisait le fond de son caractère, que le hasard vînt lui révéler le nom de l’homme sur lequel il devait faire tomber sa vengeance ; comme toutes ses mesures étaient prises, il ne tarda pas à découvrir que celui à qui il devait attribuer les continuels échecs qu’il éprouvait, n’était autre que le principal sorcier de la tribu.

Ce sorcier était un vieillard, respecté et aimé de tous à cause de sa sagesse et de sa bonté. Le Visage-de-Singe dissimula quelque temps sa haine, mais