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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

sans interruption. Le galop des chevaux que les chasseurs avaient entendu primitivement semblait être devenu multiple et partir de points opposés.

Les chasseurs haletants couraient toujours en ligne droite, franchissant ravins et fondrières avec une rapidité vertigieuse ; la terreur qu’ils éprouvaient pour les inconnus qu’ils voulaient secourir leur donnait des ailes.

Soudain un cri d’angoisse, plus strident, plus désespéré que le premier, se fit entendre à peu de distance.

— Oh ! s’écria Tranquille, en proie à une espèce de vertige, c’est elle ! c’est Carmela !

Et bondissant comme une bête fauve, il s’élança en avant suivi de Quoniam qui pendant cette course affolée ne l’avait pas quitté d’une ligne.

Tout à coup un silence de mort se fit dans le désert, tout bruit, toute rumeur avait cessé comme par enchantement, on n’entendait que la respiration haletante des chasseurs qui couraient toujours.

Un rauquement de fureur poussé par les tigres s’éleva, un craquement de branches agita un fourré voisin, et une masse énorme bondissant du haut d’un arbre passa au-dessus de la tête du Canadien et disparut ; au même instant un éclair déchira les ténèbres et un coup de feu retentit, auquel répondit presque aussitôt un rugissement d’agonie et un cri d’épouvante.

— Courage, Niña ! courage ! s’écria une voix mâle et accentuée à peu de distance, vous êtes sauvée !

Les chasseurs hâtèrent encore, par un suprême effort d’énergie, la rapidité, déjà presque incroyable,