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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

avait détachés en éclaireurs, afin d’être plutôt au courant du résultat de leurs opérations.

Un peu après le coucher du soleil, les insurgés atteignirent la forêt et disparurent immédiatement sous le couvert.

Arrivé au sommet d’une petite colline qui dominait le paysage, le Jaguar fit halte, ordonna de mettre pied à terre et donna l’ordre de camper.

Un campement est bientôt organisé au désert.

Un espace suffisant est déblayé à coups de hache, des feux sont allumés de distance en distance afin d’éloigner les bêtes fauves, les chevaux sont entravés, les sentinelles placées pour veiller à la sûreté commune, puis chacun s’allonge devant les feux, se roule dans ses couvertures et tout est dit. Ces rudes natures, habituées à braver l’intempérie des saisons, dorment aussi profondément sous la voûte du ciel que les habitants des villes au sein de leurs somptueuses demeures.

Le jeune homme, lorsque chacun se fut livré au repos, fit une ronde afin de s’assurer que tout était en ordre, puis il revint s’asseoir auprès du foyer et se plongea dans de sérieuses méditations.

La nuit entière s’écoula sans qu’il fît le moindre mouvement, pourtant il ne dormait pas ; ses yeux étaient ouverts et fixés sur les charbons du brasier qui achevait lentement de mourir.

Quelles étaient les pensées qui plissaient son front et fronçaient ses sourcils à les joindre ?

Nul n’aurait pu le dire.

Peut-être voyageait-il dans le pays des chimères, rêvait-il tout éveillé, faisant un de ces beaux songes de vingt ans, qui sont si enivrants et si trompeurs !