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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

perdit l’expression soucieuse qu’il avait revêtue, et il s’avança vers le feu le sourire aux lèvres, de l’air le plus amical qu’il put imaginer.

Au milieu d’un épais fourré d’arbres dont l’ombre protectrice offrait un abri confortable à un voyageur fatigué, un homme revêtu de l’uniforme des dragons mexicains était nonchalamment assis devant un feu qui servait à faire cuire son repas, pendant que lui-même fumait une cigarette de maïs. Une longue lance garnie de sa banderolle était appuyée contre le tronc d’un mezquite auprès de lui, et un cheval complétement harnaché, mais auquel on avait ôté le mors, broutait paisiblement les jeunes pousses des arbres et l’herbe tendre de la prairie.

Cet homme paraissait avoir vingt-sept ou vingt-huit ans ; ses traits rusés, étaient éclairés par de petits yeux vifs, et la teinte cuivrée de sa peau dénotaient son origine indienne.

Il avait depuis longtemps aperçu le cavalier qui venait à son camp, mais il n’avait semblé y attacher qu’une médiocre importance, et avait tranquillement continué à fumer et à surveiller la cuisson de son repas, sans prendre d’autre précaution contre la visite imprévue qui lui arrivait, que de s’assurer si son sabre sortait facilement du fourreau. Lorsqu’il ne fut plus qu’à quelques pas du soldat, John Davis s’arrêta, et, portant la main à son chapeau :

— Ave Maria purissima ! dit-il.

— Sin peccado concebida ! répondit le dragon en imitant le mouvement de l’Américain.

— Santas tardes ! reprit l’arrivant.

— Dios las de a Vm buenas ! répondit immédiatement l’autre.