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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

lée ; le village avait été détruit de fond en comble et ses habitants massacrés sans pitié.

Les Américains du Nord avaient enfin eu connaissance de cet Éden ignoré, et comme toujours ils avaient signalé leur présence sur ce coin de terre nouveau pour eux, et leur prise de possession par le vol, le rapt et l’assassinat.

Nous ne reviendrons pas ici sur le récit fait au Canadien par le Cerf-Noir, nous nous bornerons seulement à constater que ce récit était vrai de tout point et qu’en le faisant, le chef, loin de l’assombrir par des exagérations emphatiques, l’avait au contraire adouci avec une justice et une impartialité peu communes.

Nous pénétrerons dans la vallée trois mois environ après l’arrivée, si fatale aux Peaux-Rouges, des Américains, et nous décrirons en peu de mots la façon dont ceux-ci s’étaient établis sur le territoire dont ils avaient chassé si cruellement les légitimes propriétaires.

À peine maîtres sans conteste du terrain, les Américains avaient commencé ce qu’on appelle un défrichement.

Le gouvernement des États-Unis avait, il y a une trentaine d’années, et a probablement encore l’habitude, aujourd’hui, de récompenser les services de ses anciens officiers en leur faisant des concessions de terres sur les frontières de la République les plus menacées par les Indiens. Cette coutume avait le double avantage d’étendre peu à peu les limites du territoire américain en refoulant les Peaux-Rouges dans les déserts et de ne pas abandonner sans ressources, dans leurs vieux jours, de braves soldats