Page:Aimard - Les Trappeurs de l’Arkansas, 1858.djvu/464

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n’avez pas toujours été aussi heureux que vous l’êtes aujourd’hui, et que ce n’est que par de longs malheurs que vous avez acheté le bonheur dont vous jouissez.

Un sourire triste se dessina sur ses lèvres.

— Pardonnez-moi, m’écriai-je vivement, l’indiscrétion que je viens de commettre, ce que je craignais est arrivé ! qu’il ne soit plus question, je vous prie, de cette sotte affaire entre nous.

J’étais réellement désolé.

Don Rafaël me répondit avec bonté :

— Pourquoi ? je ne trouve rien d’indiscret dans votre question, l’intérêt que vous nous portez vous a engagé à nous la faire, il n’y a que lorsqu’on aime les gens que l’on est aussi clairvoyant. Non, mon ami, vous ne vous êtes pas trompé, nous avons tous été rudement éprouvés. Puisque vous le désirez, vous saurez tout, peut-être conviendrez-vous, après avoir entendu le récit de ce que nous avons souffert, que nous avons effectivement chèrement acheté le bonheur dont nous jouissons. Mais, entrons, l’on nous attend probablement pour nous mettre à table.

Le soir, don Rafaël retint auprès de lui plusieurs personnes, et, après avoir fait placer sur une table des cigarettes et des bouteilles de mezcal :

— Mon ami, me dit-il, je vais satisfaire votre curiosité. Belhumeur, l’Élan-Noir, la Tête-d’Aigle, mon père et ma mère, ainsi que ma chère femme, qui ont tous été acteurs dans le drame dont vous