Page:Aimard - Les Trappeurs de l’Arkansas, 1858.djvu/50

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dans les sables, emportant à l’arçon de sa selle un enfant garrotté, dont les tressaillements nerveux et les soubresauts révélaient seuls l’existence, avait un aspect fatal et étrange qui aurait imprimé la terreur à l’homme le plus brave.

Bien des heures se passèrent sans qu’un mot fût échangé entre le père et le fils ; le soleil commençait à baisser à l’horizon, quelques étoiles apparaissaient déjà dans le bleu sombre du ciel, le cheval courait toujours.

Le désert prenait d’instant en instant une apparence plus triste et plus sauvage ; toute trace de végétation avait disparu ; seulement çà et là des monceaux d’ossements blanchis par le temps marbraient le sable de taches livides, les oiseaux de proie tournaient lentement au-dessus du cavalier en poussant des cris rauques, et dans les profondeurs mystérieuses des chaparals, les bêtes fauves, aux approches du soir, préludaient par de sourds rugissements à leurs lugubres concerts.

Dans ces régions le crépuscule n’existe pas ; dès que le soleil a disparu, la nuit est complète.

Don Ramon galopait toujours.

Son fils ne lui avait pas adressé une prière, n’avait pas poussé une plainte.

Enfin, vers huit heures du soir, le cavalier s’arrêta. Cette course fiévreuse durait depuis dix heures. Le cheval râlait sourdement et trébuchait à chaque pas.