Page:Aimard - Les rois de l'océan, 1 (L'Olonnais).djvu/253

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— Ainsi, maître Chat-Tigre, et vous digne Chanteperdrix, il faut attendre.

— Longtemps ?

— Je ne crois pas. J’ai le pressentiment que Vent-en-Panne ne tardera pas à organiser une expédition.

— Contre de vos amis ?

— Pardieu ! j’en ai tant !

— Et alors ?

— Alors je les défendrai, soyez tranquilles ; mais jusques-là de la prudence ; prenez garde surtout d’éveiller les soupçons ; vivez retirés ; croyez-moi ; les yeux sont ouverts sur vous.

— Ah !

— Oui, vous voilà prévenus.

— Merci ; nous profiterons de l’avis ; nul ne nous verra.

— Comment cela ?

— Nous croiserons au large.

— Vous avez donc vraiment un navire ?

— Mais oui, capitaine ; un navire que vous connaissez qui plus est.

— Moi ?

— Avez-vous remarqué ce brick de vingt canons, mouillé tout près de vous, par la hanche de tribord ?

— Un charmant navire ; étroit, allongé, ras sur l’eau, avec ses mâts outrageusement inclinés sur l’arrière, la coque noire, une batterie rouge, et les voiles de même couleur ; God bless me ! si je le connais ; je passe mon temps à l’admirer, ce doit être un excellent marcheur !

— Il a été construit pour la traite ; au plus près les boulines roustées, il atteint douze nœuds, avec deux quarts de largue seulement, il dépasse quatorze.

— Hum ! et il se comporte à la mer ?

— Comme une dorade.

— Voilà un navire comme il m’en faudrait un !

— Cela ne tient qu’à vous, capitaine.

— Hein ? comment dites-vous cela ?

— Je dis que vous pourrez, quand il vous plaira, être propriétaire de ce charmant navire.