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Malgré toutes les vicissitudes éprouvées par cette île, pendant près d’un siècle, avant d’être définitivement cédée à l’Angleterre par le Traité de Versailles, quelques familles françaises ont continué à l’habiter ; et la plupart d’entre elles jouissent d’une réputation méritée de loyauté et d’intelligence ; ces familles, quoique vivant sous le protectorat de l’Angleterre, sont restées essentiellement françaises, et bien que descendantes des premiers possesseurs de l’île, elles se considèrent comme étrangères et ne reconnaissent d’autre autorité que celle du consul français de la Basse-Terre, chef-lieu de l’île.

Le capitaine du navire m’avait averti en jetant l’ancre à Sandy-Point, que notre séjour serait assez long et que nous resterions au moins trois semaines à Saint-Christophe.

Je fus d’abord assez contrarié ; mais comme l’habitude des voyages et la fréquentation des hommes m’a muni, grâce à Dieu, d’une assez forte dose de philosophie pratique, je pris assez facilement mon parti de ce contre-temps, et je cherchai à me mettre en mesure de passer ces trois semaines le moins désagréablement possible.

Ce n’était pas chose facile : les Anglais, fort peu accessibles chez eux et qui ne se piquent pas d’une grande urbanité envers les étrangers, sont inabordables dans leurs colonies ; d’ailleurs, j’avoue, en toute humilité, que jamais je n’ai éprouvé