Page:Aimard - Ourson-tête-de-fer.djvu/198

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terrée, sans force, presque évanouie, incapable de prononcer une parole. Dès le premier mot, par une espèce d’intuition secrète, j’avais pressenti, ou, pour mieux dire, deviné que mon père terminerait l’entretien par le nom de cet homme. Don José Rivas se leva, me lança un long regard et sortit sans me dire adieu, aussi froidement qu’il était entré. Lorsque la porte se referma sur lui, je tombai évanouie sur le plancher ; ce fut ma nourrice qui me releva. Voilà un mois que cet entretien a eu lieu, Lilia.

— Que comptes-tu faire ?

— Je l’ignore ; je ne sais qu’une chose, c’est que je n’épouserai pas cet homme.

— Mais pourquoi ce mariage ? Comment ton père, si orgueilleux de sa noblesse, a-t-il consenti ?…

Doña Elmina sourit avec amertume.

— Mon père est ruiné, Lilia, il ne lui reste pas un maravédis peut-être ; toute sa fortune appartient aujourd’hui à don Torribio ; comprends-tu ?

— Oh ! c’est affreux !… Quel espoir te reste-t-il ?

— Dieu ! s’écria doña Elmina, levant les yeux avec ferveur vers le ciel ; Dieu ! qui ne me délaissera pas, lui, lorsque tout m’abandonne.

En ce moment, la porte s’ouvrit et la négresse entra :

— Voici votre père, niña, dit-elle ; don Torribio Moreno l’accompagne.