Page:Aimard - Ourson-tête-de-fer.djvu/53

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Celui-ci était un boucanier du Grands-Fond nommé Boute-Feu ; homme sans éducation, brutal et d’un naturel méchant, qui se plut sans aucun motif à accabler son nouvel engagé de mauvais traitements, lui imposant des fardeaux au-dessus de ses forces, le battant sans raison autre que son bon plaisir, ne lui donnant à manger que les restes dédaignés par ses chiens.

L’engagé souffrit tout sans se plaindre, opposa la patience à la cruauté et redoubla d’efforts pour satisfaire le maître impitoyable entre les mains de qui son malheureux destin l’avait fait tomber.

Le boucanier, loin d’être attendri par tant de résignation, ne vit dans cette douceur et cette docilité qu’une espace de bravade et redoubla ses vexations, n’attendant qu’une occasion pour en finir avec cet homme que rien ne semblait pouvoir pousser à la révolte.

Un jour que, par une chaleur torride, le pauvre diable, pliant sous le poids de trois peaux de taureau, toutes fraîches encore et qu’il portait sur ses épaules depuis plusieurs heures, ne le suivait qu’avec peine, Boute-Feu lui adressa les plus sanglants reproches, et transporté de colère par le silence obstiné que l’engagé opposait à ses injures, il lui asséna un coup de crosse de fusil sur la tête et le renversa sanglant à ses pieds.

Au bout d’un instant, voyant que l’engagé ne donnait plus signe de vie, Boute-Feu crut l’avoir