Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/175

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rances d’amitié, car les Peaux-Rouges sont très-complimenteurs ; et ils se rendirent au campement provisoire choisi d’abord par Olivier dans la forêt, près de l’ancien étang des Castors.

Pendant tout le temps que les chasseurs étaient demeurés dans le village, constamment épiés et surveillés par les Indiens, ils n’avaient pu échanger entre eux que quelques paroles froides, cérémonieuses, et toujours sur des sujets futiles : les Peaux-Rouges se tenaient sur leurs gardes, le moindre mot aurait suffi pour leur donner l’éveil et les porter à supposer que les deux chasseurs les avaient pris pour dupes ; mais lorsque, après une longue traite faite au galop de leurs excellents mustangs, ils se furent assez éloignés pour se croire à l’abri de tout espionnage, et qu’ils se trouvèrent le soir, assis près d’un bon souper, devant leur feu de bivouac, le calumet à la bouche, leurs langues se délièrent enfin, et ils causèrent entre eux à cœur ouvert.

— Je vous dois la vie, dit rondement le Canadien, je ne l’oublierai pas ; je suis à vous depuis la plante des pieds jusqu’à la pointe des cheveux. Je suis un Canadien Bois-Brûlé de la rivière Rouge ; je me nomme Belhumeur, souvenez-vous de ce nom, la Panthère-Bondissante : quand vous aurez besoin d’un homme qui se dévoue pour vous, j’ai une peau à votre service, ne la ménagez pas, car cette peau est la mienne.

— Vous êtes un brave cœur, Belhumeur cela me plaît ! À mon tour de vous dire mon nom : les Peaux-Rouges seuls m’appellent la Panthère-Bondissante ; les chasseurs de notre couleur m’ont surnommé la Chaudière-Noire, sobriquet