Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/290

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marbre, au pied duquel attendaient une foule de serviteurs en grande livrée qui se découvrirent respectueusement à la vue de leur maîtresse et de son frère, le marquis de Soria.

La marquise se retira aussitôt dans son appartement, et Olivier se fit conduire dans le sien.

— Dans une heure, avait dit la marquise, nous nous réunirons, après avoir changé de toilette.

Et elle avait disparu avec ses caméristes.

Cette villa — nous la nommons ainsi, ne sachant comment la désigner autrement — était en réalité un magnifique château, entouré d’un immense parc, rempli d’ombre et de fleurs. Ce château était de construction moresque ; il avait, disait-on, appartenu jadis à un puissant émir parent de Boabdil, roi de Grenade. Cet émir s’était, assurait la légende, tué avec toutes ses femmes plutôt que de consentir à abandonner l’Espagne pour retourner en Afrique ; on montrait la pièce où avait eu lieu cette héroïque boucherie. C’était précisément celle qui, en ce moment, servait de chambre à coucher à Olivier. De ses fenêtres on avait sous les yeux tout le magnifique panorama de cette admirable baie de Cadix, sans rivale au monde.

Pendant qu’Olivier contemplait la mer avec cet amour profond que les marins conservent toujours pour elle au fond de leur cœur, son valet de chambre, avec son consentement, lui racontait comment l’émir, après avoir vaillamment combattu pendant tout le siége de Grenade, s’était échappé de la ville pour ne pas souscrire à la honteuse capitulation consentie par Boabdil, et s’était réfugié dans son château, où, pendant plus d’un mois, il avait résisté, avec ses seuls serviteurs, à