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SUR LA COLLINE.

cierez davantage votre sort, si vous connaissiez comme moi par expérience la misère et le travail.

— Vous supportez si bien tout cela, que personne ne se douterait que vous avez des chagrins, dit Merry. Vous avez raison, je n’ai pas le droit de me plaindre de mon sort, et cela ne m’arrivera plus !… Je suis bien contente que vous ayez enfin la possibilité de réaliser vos désirs.

— Il faudra joliment travailler pour y arriver, dit Ralph. David prétend qu’on ne peut pas vivre là-bas à moins de cent à cent trente dollars par an, même en logeant dans un grenier et en se nourrissant de pain et d’eau. Mais les privations m’importent peu, car grand’maman ne manquera de rien chez sa nièce. Elle dîne dehors aujourd’hui, sans cela je ne serais pas venu, » dit-il comme pour s’excuser.

Le bon cœur de Merry s’était déjà apitoyé sur sa misère future. Elle fut heureuse de penser qu’il y avait justement chez elle un bon souper, et que cette fois encore l’artiste pourrait manger à son appétit. Ils étaient arrivés à la porte de la ferme.

« Entrez donc, lui dit-elle ; tout le monde sera content de vous voir et de vous entendre raconter vos nouvelles. »

Ralph ne pouvait guère refuser une invitation qu’il avait cherchée. Ils entrèrent de compagnie, au grand bonheur de Roxy qui courut aussitôt chercher le plus beau des pâtés que Merry avait faits le matin. Pendant ce temps, Merry donnait un dernier coup d’œil au repas, et mettait sur la table, comme ornement, un petit vase de fleurs. Ses frères le renversèrent presque aussitôt. Cela, c’était inévitable, mais, devant un étranger, per-