Page:Alexis de Tocqueville - L'Ancien Régime et la Révolution, Lévy, 1866.djvu/85

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Le gouvernement central ne se bornait pas à venir au secours des paysans dans leurs misères  ; il prétendait leur enseigner l’art de s’enrichir, les y aider et les y forcer au besoin. Dans ce but, il faisait distribuer de temps en temps par ses intendants et ses subdélégués, de petits écrits sur l’art agricole, fondait des sociétés d’agriculture, promettait des primes, entretenait à grands frais des pépinières dont il distribuait les produits. Il semble qu’il eût été plus efficace d’alléger le poids et de diminuer l’inégalité des charges qui opprimaient alors l’agriculture  ; mais c’est ce dont on ne voit pas qu’il se soit avisé jamais.

Quelquefois le conseil entendait obliger les particuliers à prospérer, quoi qu’ils en eussent. Les arrêts qui contraignent les artisans à se servir de certaines méthodes et à fabriquer de certains produits sont innombrables ; et, comme les intendants ne suffisaient pas à surveiller l’application de toutes ces règles, il existait des inspecteurs-généraux de l’industrie qui parcouraient les provinces pour y tenir la main.

Il y a des arrêts du conseil qui prohibent certaines cultures dans des terres que ce conseil y déclare peu propres. On en trouve où il ordonne d’arracher des vignes plantées, suivant lui, dans un mauvais sol, tant le gouvernement était déjà passé du rôle de souverain à celui de tuteur.