Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/102

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honoré par le plus grand nombre, et je distinguerai le faux du vrai, en appellant faux ce désir d’honneur, qui n’a pas pour motif et pour base la vertu de celui qui veut être honoré, et l’utilité véritable de ceux qui honorent. J’appellerai véritable, au contraire, ce désir d’honneur qui ne se fonde sur d’autre base et d’autre raison que la pratique nécessaire de la vertu. Ces principes posés, examinons quel est l’honneur sous les tyrannies, qui le professe, à qui il sert, de quelle vertu il prend naissance, et quel est le bien et l’utilité qui en résultent.

L’honneur, sous la tyrannie, se vante lui-même, comme la seule impulsion légitime qui détermine tous ceux qui prétendent ne point agir par peur. Le tyran n’est pas fâché de voir que la peur cachée sous un autre nom, produise néanmoins à son profit les mêmes effets et de plus grands encore ; il doit donc seconder par tous ses moyens cette vulgaire opinion. Avec le simple nom d’honneur qu’il a toujours sur les lèvres, il réussit à déterminer ses sujets à des entreprises grandes et courageuses, qui seraient vraiment honorables si elles n’étaient faites pour son seul avantage et contre l’intérêt public. Mais si l’honneur veut dire :