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MÉLITON DE SARDES

V, 2

MeXÎTcova tov eùvoù/ov, tov ïv àyico Tcveûim-ri Trâvxa 7toXiT£’jai{i£vov, Méliton, l’eunuque, qui se guidait en tout par les conseils du Saint-Esprit. » Dans Eusèbe, H. E.. Y, xiv, P. G., t. xx, col. 496 A. Selon toute vraisemblance, l’expression sùvoûyoç, comme très souvent dans les vieux textes, doit s’entendre de celui qui garde la continence volontaire.

Peu de temps après, Clément d’Alexandrie, dans un ouvrage perdu, répondait aux arguments apportés par Méliton en faveur de ce même usage asiale. Attestation d’Eusèbe, ibid., IV. xxvi. col. 393 A. — Tertullien s’intéressait aussi à lui, bien qu’il ne partageât pas ses idées sur le montanisme, et dans un traité également disparu, De extasi libri vu. il se moquait de la faconde déclamatoire de Méliton. Attestation de S. Jérôme, VÎT. ili, 24, P. L., t. xxiii, col. 678. — — Hippolyte (ou l’auteur anonyme du Polit Labyrinthe) se réclamait de son témoigage pour combattre l’hérésie d’Artémon : « Qui ne connaît, écrit-il, les livres d’Irénée, de Méliton et d’autres qui proclament le Christ Dieu et homme ? » Dans Eusèbe, Y, xxviii, col. 512 C. — Sensiblement à la même date Origène cite, dans son commentaire sur les Psaumes, une opinion de notre auteur, d’après laquelle Absalon aurait été le type, la figure du diable. In Psalm., iii, 1, P. G., t. xii, col. 1120. De même il combat, dans le commentaire sur Gen., i, 26, une idée de Méliton. qui semblait attribuer à Dieu la corporéité. MeXîtmv a<jyYP ! *V L l J — 0l — rx x<x-aXeXoiT : àç rcepi toO bjGÛu.a.’zov etvai tôv ©eov. Ibid., col. 93 A.

Renseignements fournis par Eusèbe.

A plusieurs

reprises Eusèbe revient sur Méliton. — La Chronique (au moins dans la version hiéronymienne) signale à la 11e année de Marc-Aurèle la remise à l’empereur par Méliton de Sardes d’une apologie pour les chrétiens. Cf. P. L., t. xxvii, col. 472. — L’Histoire ecclésiastique invoque le témoignage de celui-ci en faveur de l’authenticité du rescrit soi-disant adressé par Antonin le Pieux au Kotvov d’Asie. H. E., IV, xiii, P. G., t. xx, col. 337 A ; elle le mentionne aussi parmi les écrivains qui fleurirent au temps de cet empereur, IV, xxi, col. 378 ; enfin elle lui consacre une notice littéraire considérable sur laquelle nous aurons à revenir. IV, xxvi, col. 392-398. Cette notice fournit le plus clair de nos connaissances sur Méliton.

3° Renseignements postérieurs. — Saint Jérôme peut ù peine être mentionné, car le chapitre xxiv, du De viris, qui traite de Méliton n’est guère qu’une simple traduction (avec quelques contresens) de la notice d’Eusèbe. P. L.. t. xxiii, col. 678 ; consulter de préférence l’édition Bernoulli, dans la collection Krùger, Sammlung ausgewùhlter k. und dg. Quellenschriften, n. 11. — Pourtant la connaissance de notre auteur ne disparaît pas complètement de l’Église latine. Au ve siècle, Gennade, dans son traité De Eccles. dogm., mentionne expressément Méliton, comme ayant professé sur la corporéité de Dieu des idées analogues à celles de Tertullien, op. cit., iv, P. L., t. lviii, col. 982 ; et les Mélitiens, qu’il signale au c. lv, col. 994, comme partisans du millénarisme, pourraient bien être des gens qui ont lu Méliton et accepté ses idées ( ?).

L’Église grecque ne le connaît pas beaucoup mieux. Pitra, Spicileg. Solesm., t. ii, p. x, n. 1, a conjecturé que, dans le passage où il discute les opinions des auteurs ecclésiastiques qui ont écrit rcepl’l ? ufT i q te Kccl acli’j.-j.-’K, Grégoire de Xysse, peut viser un ouvrage de Méliton qui, dans la liste d’Eusèbe, porte en effet ce titre. Cf. Grégoire de Nysse, De hominis opificio, xxviu, P. G., t. xliv, col. 229 B. Cet indice paraît bien fugitif. — Par contre, il est certain que l’auteur du Chronicon pascale, au viie siècle, connaît, au moins par Eusèbe, l’existence de Méliton et de l’apologie adressée par lui à Marc-Aurèle. An. 169, et aussi 164-165, P. G., t. xcii, col. 632, 639. Au viie siècle également, Anas tase le Sinaïte, rassemblant les témoignages patrlstiquos contre les monophysites, cite, avec références à l’appui, quelques passages du vieil évoque. Hodegos, c. xii et c. xiii, P. G., t. lxxxix, col. 197 A, 228 D229 A B. Et le moine du Sinaï qualifie Méliton de Œïoç xoci, Tiàvaoço ; èv SiSaaxàXoiç. Des Chaînes sur la Genèse qui peuvent remonter à la même date fournissent quatre scolies données comme de Méliton. Après quoi c’est l’oubli complet.

L’Église syrienne l’avait connu elle aussi, puisque un ms. syriaque, sur lequel nous reviendrons, donne quelques extraits, qui paraissent authentiques, d’un ouvrage que l’on croit avoir retrouvé sur la liste d’Eusèbe. D’autre part un copiste accolait le nom de Méliton le philosophe à une apologie du christianisme, où il croyait retrouver l’œuvre de l’évêque de Sardes dont Eusèbe avait parlé. Mais les confusions sont déjà commencées ; elles continueront au Moyen Age, aussi bien en Orient qu’en Occident, et c’est signe que, si l’antique docteur n’est pas tout à fait un inconnu, du moins il ne représente plus à ceux qui en transcrivent le nom aucun souvenir précis.

C’est à l’aide de ces maigres renseignements qu’il faut situer le vieil écrivain. Nous ignorons tout de ses antécédents : en particulier il est impossible de dire le lieu et la date de sa naissance. Évêque de Sardes, il a pris part à la première controverse sur la fixation de la Pâque, comme il ressort du début du livre 7repi. toC nâa^ot, qu’Eusèbe nous a conservé, controverse qui eut lieu « à Laodicée, du temps que Servilius Paulus était proconsul d’Asie et que Sagaris fut martyrisé ». Or on connaît un proconsul d’Asie qui s’appelait non Servilius, mais Sergius Paulus (c’est aussi la leçon de Ru fin dans sa traduction d’Eusèbe), dont l’administration prit fin en 167 ; c’est avant cette date qu’il faut donc situer la conférence de Laodicée. La date de l’Apologie est rapportée par la Chronique d’Eusèbe à la (Xe ou) XIe année de Marc-Aurèle, 169. Ce sont les seuls événements de la vie de Méliton auxquels il soit possible d’attribuer une date tant soit peu ferme. Quand se place un voyage que fit notre auteur en Orient, sic àvaxoXYjv, voyage qui lui donna l’occasion de vérifier le contenu du canon de l’Ancien Testament (Eusèbe, loc. cit., col. 396 C D), il est impossible de le dire. L’attitude de Tertullien par rapport à Méliton indique suffisamment que l’évêque de Sardes avait combattu le montanisme naissant. Mais on sait combien il est difficile de préciser l’époque où débuta ce mouvement. La date de la mort de Méliton ne peut non plus être précisée. Il s’était endormi dans le Seigneur quand Polycrate d’Éphèse, vers 195, écrivait au pape Victor, mais depuis peu de temps sans doute, puisqu’il figure le dernier sur la liste des « grandes lumières » d’Asie, laquelle semble bien suivre un ordre chronologique. Il avait laissé, en tout cas, une réputation de sainteté et de sagesse qui permettait de le ranger au nombre des plus saints personnages qu’avait connus cette province.

IL Les écrits. — — Eusèbe eut entre les mains, sans doute à la bibliothèque de Césarée, bon nombre d’ouvrages composés par Méliton ; il en donne la liste, sans vouloir prétendre qu’elle est complète et renferme toutes les productions de l’auteur : « Des livres qu’il a composés, voici ceux qui sont venus à notre connaissance. » H. E., IV, xxvi, col. 392 A. Il semble bien que l’on ait retrouvé des traces d’ouvrages inconnus à Eusèbe. Enfin, à une époque plus ou moins reculée, divers ouvrages ont été mis, à tort, sous le nom de l’évêque de Sardes. Nous examinerons successivement ces trois catégories d’écrits.

La liste d’Eusèbe.

On a prétendu que cette

liste était rédigée selon l’ordre chronologique, en sorte qu’elle permettrait de restituer la série des préoccu-