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PAPE. LE CONCILE DE TRENTE

’t. vi, 1926, p, 1. La diminution considérable du nombre des bénéfices dans les sociétés modernes, où tant de charges, autrefois d’Église, se sont sécularisées ; la réforme protestante, qui détacha de Rome des pays entiers ; la conclusion de pactes concordataires, qui firent passer prébendes et cures aux mains des souverains laïcs : autant de causes qui réduisirent considérablement la matière même où le droit de collation pontificale aurait pu encore s’exercer. Aujourd’hui, en dehors d’Italie, la réserve n’existe plus que dans des cas fort rares : pour les dignités capitulaires, pour les bénéfices dont le précédent possesseur, au moment de la vacance, appartenait à la prélature romaine, même à titre purement honorifique ; pour ceux dont la mort atteint le titulaire quand il se trouve à Rome ; pour ceux dont la collation s’avère nulle, comme entachée de simonie ; pour ceux, enfin, sur lesquels le pape a « mis la main », ce qu’il peut faire de quatre façons : en déclarant nul le scrutin, s’il s’agit d’un bénéfice électif, ou en interdisant aux ayants droit de procéder au vote ; en recevant la démission du bénéficier précédent ; en en élevant celui-ci, pour le promouvoir à une charge supérieure, le transférer autre part ou simplement le priver de son emploi ; enfin en confiant le bénéfice en commende. Code de droit canonique, can. 326, § 1, 1435, Mais à côté de la pratique, il y a le principe juridique, et le pape pourrait toujours, s’il le voulait, s’en prévaloir ; le can. 1431 le formule en ces termes : Jus romaiw pontiflei est bénéficia in universa Ecclesia conferendi eorumque collationem sibimel reservandi ; de quoi il faut rapprocher le can. 1434 : Bénéficia Sedi apostolicæ reservata ab in/erioribus invalide conjeruntur.

VII. LA PRATIQUE DES CONCORDA TS.

Le XVe siècle

ne fut guère favorable au progrès de la centralisation romaine. La papauté sortait du Grand Schisme affaiblie, discréditée par les abus des rivauxsuccessifs. Tout le monde demandait une réforme de l’Église, non seulement in membris, mais in capile. Dans l’atmosphère enfiévrée parla fermentation d’idées libérales ou révolutionnaires, la théorie gallicane de la supériorité du concile sur le pape, toute défavorable qu’elle fût au Saint-Siège, représentait encore une tendance modérée. Jamais l’Église catholique n’avait connu pareille crise constitutionnelle.

Contre la poussée démocratique, dont les conséquences apparurent en pleine lumière dans la dernière période du concile de Râle, la papauté chercha, et Irouva, un appui dans les pouvoirs civils, tout d’abord favorables aux idées conciliaires. En effet, les rois n’étaient point sans comprendre l’inconvénient des assemblées délibérantes ; eux-mêmes travaillaient aies affaiblir dans leurs États. Quel intérêt pourraient-ils avoir au réveil d’anciennes libertés ecclésiastiques ? N’était-il pas plus simple de traiter avec Rome ? De gouvernement à gouvernement, l’on peut toujours négocier et s’entendre.

Ces dispositions servaient trop les intérêts du Saint-Siège pour qu’il n’y répondît pas. En 144JS. Nicolas V conclut avec Frédéric III un accord réglant le statut ecclésiastique de l’empire germanique ; les négociations qui devaient aboutir au concordat français de 1516 sont entamées dès 1442 ; 1ère des conventions commence. Mais qui ne voit qu’elle marque, pour le Saint-Siège, un progrès considérable sur la situation immédiatement postérieure au Grand Schisme ? Alors, on érigeait au-dessus de lui les libertés ecclésiastiques, réputées intangibles ; maintenant, il en dispose, et s’il consent à des sacrifices, il est censé les faire de plein gré. En un certain sens, la centralisation recule, car les épiscopats nationaux vont dépendre beaucoup moins étroitement de Rome qu’avant le schisme : ils s’appuieront beaucoup plus sur les royautés respectives. Mais le principe n’y perd rien, puisque les rois n’agi ront, en somme, qu’en vertu d’une délégation consentie par le pape. Imbart de la Tour, loc. cit., p. 843 et sq.

VIII. LE CONCILE DE TREJS TE i r SES SUITES.

Or, la

même idée de réforme, qui avait menacé, au xve siècle, la suprématie du gouvernement pontifical, va au cou traire, au xvie, l’asseoir sur des bases nouvelles et faire entrer la centralisation dans sa phase définitive. On peut dire que la forme actuelle de la centralisation, c’est Luther, en bonne partie, qui donna prétexte de l’introduire. D’abord, c’est pour dépister et combattre ses idées que Paul III, le 21 juillet 1542, créa la plus ancienne des congrégations cardinalices permanentes, le premier rouage d’une machine nouvelle qui n’a fait, depuis, que se compléter et se perfectionner : le Saint-Office, chargé de surveiller, sous les yeux du pape, la foi catholique dans l’univers entier et de la préserver par des moyens constamment mis au point, tribunal sans appel, à compétence territoriale illimitée, pouvant attirer à lui toutes les causes touchant le dogme, ou désigner les juges qui en connaîtraient sur place. Constitution Licet ab initia, Bullaiium romanum, éd. de Turin, t. vi, p. 344.

Mais surtout les dangers pressants que l’hérésie luthérienne faisait courir au catholicisme imposèrent, bon gré mal gré. la tenue d’un concile dont personne ne pût sérieusement contester le caractère œcuménique, le fameux concile si souvent réclamé en vain depuis l’assemblée de Constance. Or, si le concile de Trente ne manqua point de préciser la doctrine, il s’occupa de la rc/ormation. Dans ses vingt-cinq sessions, qui s’échelonnèrent de 1545 à 1563, il toucha à toutes les questions un peu importantes qui concernent la discipline ecclésiastique : pouvoirs et obligations des évêques, des chapitres, des curés, tenue des synodes provinciaux et diocésains, nomination aux diverses charges, éducation et mœurs du clergé, instruction des fidèles ; sur le mariage chrétien, les conditions requises pour recevoir les saints ordres, la célébration des messes, l’administration des biens d’Église, il confirma, rectifia ou compléta l’ancienne législation,

Or, avant de se séparer, le 4 décembre 1563, les Pères de Trente se préoccupèrent de l’avenir de leur œuvre. Convaincus que sa réception et son observation n’iraient point sans susciter de nombreuses difficultés pratiques, ils confièrent au pape, éventuellement, le soin de les aplanir : sess. xxv. De recipiendis cl observandis decretis concitii. Il ne s’agissait point là d’une délégation : l’assemblée avait reconnu d’avance que le pape n’en avait pas besoin, puisqu’elle avait proclamé, à diverses reprises, le pouvoir suprême du pape dans l’Église universelle, p. ex. sess. xiv, de pœnitentia. c. vu ; elle tint, du reste, à soumettre à l’approbation de Pie IV toutes les décisions qu’elle avait prises : sess. xxv, De fine concilii et confirmatione petenda a sanctissimo domino noslro. Ce fut plutôt un vœu que le concile formula : il exprima sa confiance que le pontife suprême saurait résoudre toutes les difficultés, en usant des moyens qu’il jugerait les plus opportuns : confidil sancta synodus beatissimum romanum pontificein curaturum… quacumque ratione ei visum fuerit… En outre, il laissa au pape la charge de mettre au point et de publier la liste — l’index — des livres condamnés, dont la session xviiie avait prescrit l’établissement, de même que le catéchisme, le missel et le bréviaire dont l’Église se servirait à l’avenir : sess. xxv. De indice librorum et catechismo, breviario et missali.

Toute la nouvelle législation se trouvait donc ainsi placée, de façon spéciale, sous l’autorité et la sur veillance du souverain pontife, constitué gardien, interprète et continuateur de l’œuvre conciliaire ; et nous