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PAUL (SAINT). LE CHRIST, FILS DE DIEU


êtres du non être à l’être ; mais de l’acte conservateur par lequel Dieu gouverne toutes choses par son Verbe, l’action créatrice ayant déjà été décrite au verset précédent. Telle est l’interprétation de saint Jean Chrysostome, h. L, P. G., t. lxiii, col. 23. Cependant, saint Grégoire de Nysse l’entend de l’acte créateur : cpépet 6 Aoyoç èx T °û l*-*l ovxoç eîç ysveaiv. De perfecla christiani forma, P. G., t. xlvi, col. 265. Cf. Gen., i, 2 ; Sap.. xi, 17-18 ; Prov.. viii, 22 sq., 30 ; Col. i, 17 ; ii, 9 ; Joa., i. 3 ; Apoc, iii, 14.

Après avoir présenté ainsi le Fils de Dieu dans sa transcendance et sa préexistence, l’auteur mentionne son œuvre de Fils incarné. Il a accompli la « purification, xa6api.afi.6v, des péchés » ; cf. Job, vu. 21 (LXX) ; Heb., ix, 14 ; Matth., viii, 3, cf. i, 21 ; Gal., i, 4 ; I Cor., xv, 3 ; Col., i, 14, 20 ; Eph., i, 7 ; I Joa., îv, 10 ; II Petr., i, 9 ; Apoc, i, 5. Cette œuvre avec ses résultats sera expliquée dans la suite à propos de l’olTice du « grand prêtre ».

Dans la troisième phase de son activité, le Fils « s’est assis à la droite de la Majesté, dans les hauteurs, et il est devenu d’autant supérieur aux anges, qu’il a reçu en héritage un nom plus grand que le leur ».

L’auteur ne fait que mentionner en quelques mots l’œuvre terrestre du Christ, mais il insiste sur sa glorification. Son but est de montrer la supériorité du Fils sur les anges. Il est assis, à la droite de la Majesté, c’est-à-dire de Dieu ; cf. Ps. ex, 1 ; Matth., xxii, 44 ; il est associé à sa dignité, à sa puissance. Les anges, eux, sont debout, cf. Is., vi, 2, ou prosternés devant Dieu. Cf. Eph., iv, 10. Entre le Fils et les anges il n’y a pas seulement une différence de degré, mais de nature ; mais il s’agit de son élévation dans son humanité glorifiée ; cf. saint Jean Chrysostome, Théodore !. C’est pourquoi il a reçu un nom, une autorité plus grande que la leur. Dans les autres épîtres pauliniennes ce nom est celui de « Seigneur Christ », équivalent au Jahweh de l’Ancien Testament. Cf. Phil., il, 9-10 ; Eph., i, 21. Dans l’épître aux Hébreux, il semble bien que ce nom soit celui de « Fils », par opposition à « serviteur ». Cf. saint Jean Chrysostome. Les anges et Moïse, c’est-à-dire les intermédiaires ou les médiateurs de l’ancienne alliance ne sont que des serviteurs, i, 14 ; iii, 6-7. Le Fils de Dieu leur est donc supérieur. Mais il s’agit du Fils incarné, glorifié dans son humanité et devenu Seigneur après son abaissement au-dessous des anges, de Jésus, personnage historique, et non du Fils dans sa préexistence, comme ci-dessus, D. 1-3. Cf. Luc, xxii, 69-71 ; Act., ii, 36 ; xiii, 33.

Cette supériorité du Fils sur les anges est prouvée par un grand nombre de textes tirés surtout des psaumes. D’abord, le texte classique sur la filiation du Messie, Ps. ii, 7 : « Tu es mon Fils, je t’ai engendré aujourd’hui. » Voir ci-dessus, col. 2360 sq. Puis II Reg.. vu, 14 : « Je serai pour lui un père et il sera pour moi un fils » ; et « quand il introduit le « prernierné » sur la terre, il dit : Que tous les anges de Dieu se prosternent devant lui », Ps. xcvii, 7. Le hodie f/enui le et l’entrée du « premier-né » dans le monde visent l’incarnation, d’après saint Jean Chrysostome et Théodoret.

Une série d’autres textes, cités d’après les LXX, viennent illustrer l’affirmation que le Fils est supérieur aux anges, ceux-ci n’étant que des serviteurs. Cette première preuve d’Écriture se termine par le psaume messianique ex, 1 : cf. Matth., xxii, 44 ; Act., ii, 34.

Une autre preuve de la supériorité du Fils, c’est que le « monde futur » a été assujetti au Fils, non aux anges. Elle s’appuie sur le Ps. viii, 5-7, qui paraît cité de mémoire d’après les LXX. Remarquer la formule de

citation : « Aussi quelqu’un a-t-il rendu ce témoignage quelque part. » Le texte cité a un sens très différent de l’original. Dieu a abaissé le Fils de l’homme un moment (ou un peu) au-dessous des anges ; puis il l’a couronné de gloire et d’honneur ; il a mis « toutes choses sous ses pieds ». Il lui a soumis l’univers et « n’a rien laissé en dehors de son empire ». Jésus a été « comblé de gloire et d’honneur à fau.se de la mort qu’il a soufferte », et c’est au « bénéfice de tous qu’il a goûté la mort ». ii, 5-9.

Ainsi, la mort de Jésus, loin d’être un souvenir pénible ou un opprobre, est une source de salut et de vie, parce qu’elle a été suivie de la résurrection et de la glorification. Cf. I Cor., xv, 17-18. Voir le commentaire de saint Jean Chrysostome.

La nature humaine du Christ et la valeur de ses souffrances sont spécialement mises en relief dans ii, 10-18. Ce passage caractéristique de l’épître contient la raison de l’incarnation et de la mort du Christ : Il convenait, ènpzntv, - à Dieu, « de rendre parfait, par les souffrances, l’auteur (àpy/jyôv, le chef) du salut ». En effet, « celui qui sanctifie », le Christ, et « ceux qui sont sanctifiés », les hommes, ont une communauté d’origine et, par suite, de nature, zE, évôç. Les hommes ayant en partage la chair et le sang, c’est-à-dire la nature humaine, le Christ aussi a pris cette nature, xexoivoW/ ; xev, « afin de briser, par sa mort, la puissance de celui qui a l’empire de la mort, c’est-à-dire de Satan, et de délivrer ceux que la crainte de la mort retenait toute leur vie assujettis à la servitude ». Ayant à secourir des hommes, le Christ a dû « être fait semblable en tout à ses frères », xaxà TtâvTa toïç àSeXçoïç ôu.oicù6î)vai, . Ainsi, il a pu être un « pontife miséricordieux, s’acquittant fidèlement de sa fonction auprès de Dieu, pour expier les péchés du peuple. C’est parce qu’il a souffert et a été lui-même éprouvé, nzipa.aQziç, qu’il peut venir en aide à ceux qui sont dans l’épreuve. »

Ces « épreuves » du Christ sont exposées plus longuement, iv, 14-v, 10, à propos de son rôle de grand-prêtre. Ici, ses souffrances et sa mort sont présentées sous un rlouble aspect. D’abord, Dieu, ayant fait du Christ l’auteur du salut, l’a rendu parfait dans sa gloire par le moyen de ses souffrances et de sa mort. Il s’agit de la « perfection » de la nature humaine par la résurrection et la glorification ; non que la nature humaine du Christ fût imparfaite en tant que nature avant sa mort, mais parce qu’elle n’était point encore à l’état glorieux, dans le monde céleste, le monde pariait. Voir plus haut le sens du mot « perfection », col. 2480. « En ressuscitant des morts, cette nature nous a procuré à tous la résurrection. » Théodoret, h. I. De plus, le Verbe incarné, par sa mort, a brisé la puissance de Satan, ou l’empire de la mort. Il est à peine besoin de faire remarquer que cette doctrine est exactement dans la ligne des autres épîtres pauliniennes.

Mais le deuxième aspect des souffrances ou des épreuves du Christ est spécial à l’épître aux Hébreux : ayant à secourir, s7uXa|i.6aveTai, des hommes, non des anges, il a pris la nature humaine. Ses expériences humaines de la souffrance et de la mort l’ont rendu compatissant à l’égard des hommes et il garde ces sentiments envers eux en continuant son œuvre d’expiation, à titre de grand-prêtre, dans le monde céleste. Dans ce dernier aspect de l’œuvre du Christ, la valeur morale de ses souffrances est rattachée à l’idée sacerdotale ou lévitique de l’expiation. Le sacerdoce éternel et parfait du Christ remplace le sacerdoce de l’ancienne Loi. Cette idée fournira le thème principal de l’épître, iv, 14-x, 18.

Mais l’auteur doit montrer auparavant que le Fils est supérieur non seulement aux anges, les serviteurs de Dieu, mais encore à Moïse, le médiateur de l’an-