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PÉCHÉ ORIGINEL. DOCTRINE DE S. AUGUSTIN


fueral reclus, acceperat posse non peccare…, datum est adjulorium perseverantiæ, non quo fieret ut pcrseveraret, sed sine quo per liberum arbitrium perseverare non posset. Ibid., xii, 34, col. 937.

Autre privilège de cet état : l’immortalité conditionnelle. Adam pouvait ne pas mourir à condition qu’il ne fît rien pour se séparer de l’arbre de vie nécessaire pour conserver son corps, animal et mortel par nature : Mortalis ergo erat conditione corporis animalis, immortalis autem bénéficia Conditoris. Si enim corpus animale, ulique mortale, quia et mori potcral, quamvis et immortale, ideo quia et non mori poterat. De Gen. ad lilt., VI, xxv, 36, t. xxxiv, col. 354 ; De civ. Dei, XIII, xx, t. xli, col. 394.

Enfin, la concupiscence, l’ignorance et l’erreur n’étaient point liées à l’institution première de notre nature, Opus imperf., V, 1, t. xlv, col. 1432, et ne venaient troubler, distraire ni égarer la volonté.

Ainsi, loin d’être nécessitée à déchoir, notre nature avait tout reçu de Dieu pour l’aider à s’attacher à lui. Elle pouvait cependant s’en détacher : parce qu’elle était créée et n’avait point encore reçu la vraie « liberté » des élus qui consiste à ne pouvoir plus pécher. « Changeante, parce que créée de rien et par conséquent imparfaite, notre volonté n’a eu qu’à se laisser choir du Créateur aux créatures pour introduire, en elle et dans l’univers, le désordre initial du péché. » Et. Gilson, op. cit., p. 183. Cf. De civ. Dei, XII, vin, t. xli, col. 355. Ainsi la possibilité pratique du péché tient en somme à la condition même de créature tirée du néant : par le fait de sa création Adam était changeant.

Il devait cependant ne pas s’abandonner au mal, ne pas se détourner du souverain bien : le Créateur avait le droit d’imposer à l’homme un précepte facile, et celui-ci lui devait en justice l’obéissance. La chute fut une injustice d’autant plus grande que le précepte était plus facile. De civ. Dei. XIV, xii, t. xli, col. 420.

Ainsi la cause du péché originel en Adam n’est point à chercher en Dieu auteur des natures : il avait été magnifique dans l’institution de la nature humaine ; ni en Dieu législateur : son précepte était facile ; ni dans une difficulté de la volonté : elle ne connaissait pas encore les résistances de la cupidité. De ctvit. Dei. ibid. La cause du péché se trouve seulement dans la volonté de l’homme et spécialement dans sou orgueil : « La chute, puisque c’en fui une, n’a pas été la chute naturelle et fatale d’une pierre qui tombe, mais la chute libre d’une volonté qui s’abandonne. Et. Gilson, op. cit.. p. 183 et 187 ; cf. De libéra arb., III, i, 2, t. xxxii, col. 1221 ; De divers, quæst. lx.xxiii, q. i-iv,

t. XL, col. 1 1-12.

b) Nature et gravité //< In chute. A la base de la chute d’Adam, il y a l’orgueil. A l’extérieur, ce fut la transgression d’un précepte facile à éviter ; a l’intérieur, dans la source secrète de l’âme, ce fut un péché d’orgueil : l’appétit pervers d’un rang qui n’étail pas le sien. L’homme commença a se complaire en lui-même ; n’était cette complaisance initiale, la promesse du démon, « vous serez semblables à Dieu n’eûl point

réussi à le séduire. Semblable a Dieu, il VOUlut l’être en se prenant comme principe et en ne s’attachant point au souverain bien : il v eût mieux rél

'i tachant a I >ieu par l’obéissance qu’en devenant son propre principe par l’orgueil ; car les dieux créés ne sont [ias dieux par la pauvre vérité de leur nature, mais bien par la participation au Dieu vrai. C’esl dans le langage même d’Vugustin qu’il faut lin’cette interprétation du péché d’origine que les meilleurs théolo giens postérieurs ne feront que reproduire : Quid est iuperbia, nisi perversæ celsitudinis appelitus ? l’crvcrsa enim celsitudo est, deserto m eut <li’brt antmus Inhsenre

principio, sibi quodammodo fieri alque esse principium. Hoc fit, cum sibi nimis placet. Sibi vero ita placet, cum ab illo bono immutabili déficit, quod ci magis placcre debuit quam ipse sibi. De civ. Dei, XIV, xiii, xiv, t. xli, col. 420-422.

De la nature de ce péché découle sa gravité : elle apparaît dans les dépravations qu’elle contient : orgueil, sacrilège, homicide, fornication spirituelle, vol et avarice. Enchir., 45, t. xl, col. 254. Elle s’explique par l’excellence de la nature d’Adam : Ipse primus Adam naturse tam excellentis fuit, ut peccatum ejus lam longe majus c&terorum peccatis esset, quam longe melior cseteris fuit. Opus imperf., VI, 22, t. xlv, col. 1554. La volonté qui l’inspire dépasse toutes les autres en intensité : Apostasia primi hominis, in quo summa erat et nullo impediabatur vilio libertas propri.r voluntatis, tam magnum peccatum fuit, ut ruina ejus natura humana esset tota collapsa, Opus imperf., III, 57, P. L., t. xlv, col. 1275. Aussi, à la différence des péchés des autres parents, qui se propagent aussi, pense saint Augustin, jusqu’à la troisième ou la quatrième génération, l’acte prévaricateur d’Adam est si grand, que non seulement il a fait déchoir la nature tout entière, mais il l’a fait pécheresse et génératrice de pécheurs. Opus imperf., ibid. ; cf. De nupt.el concup., II, xxxiv, 57, t. xliv, col. 471 : lllo magno primi hominis peccato, natura ibi nostra in deterius commutata, non solum fada est peccatrix, verum etiain gênerai peccalores.

2. Nature, gravité et transmission de la faute originelle dans les descendants d’Adam. — Cette question a été particulièrement discutée en ces derniers temps. Cf. art. Augustin, col. 2395-2397 ; Tixeront, op. cit., t. ii, p. 472-475 ; Kors, op. cit., p. 15-22. Des textes de saint Augustin on peut tirer, par comparaison avec la doctrine des adversaires, les conclusions suivantes :

a) Le péché originel dans les descendants d’Adam est essentiellement un état de culpabilité, consécutif à l’acte prévaricateur du premier homme, induit dans la nature déchue en raison de la participation de celle-ci à la volonté mauvaise qui a inspiré l’acte.

Ceci découle déjà de la théorie générale d’Augustin, d’après laquelle le péché n’est point constitué par un mal de la nature comme telle, mais par un mal de la volonté. Puisqu’il ne peut être question, dans les enfants, de volonté personnelle, leur péché ne peut s’expliquer que par rapport à une volonté de nature dont ils sont solidaires.

Saint Augustin l’a affirmé explicitement en plusieurs fois : dans les Ilétractations, I, xv, 2, t. xxxii, col. (108, en défendant son principe : nusquam nisi in voluntate esse peccatum, Augustin maintient que le péché originel, dans lequel nous sommes tous impliqués et qui nous rend soumis à un châtiment, ne fait pas exception, au contraire ; non seulement il a été commis par la volonté d’Adam, mais c’est surtout de ce péché d’origine qui est passé à la nature humaine, qu’il faut dire qu’il n’a de réalité physique que dans la volonté du premier homme : Quasi vero peccatum

quod eos es Adam dlcimus originaliter trahere, id est

realu ejus tmplicatos, et ob hoc pcenm obrlOXiOS detincri, USquam esse potuli nisi in VOluntate, qua voluntate. rnin missinn rsi. guando divint preecepti est facta transgression. Peccatum autem quod nusqueun est nisi in voluntate, iiiuii preeetput intelligendum est, <p<ui futta damnnliii ooruccuta rsl. Une mim per unum hominem introtvil in mundum. Ull peu plus haut. 1. xiii. >. COl "I. il axait dd : Illud quod in parvulis dtcttur originale pec catum, cum adhuc mm utantur arbltrio voluntatis, non absurde vocatur ettam voluniarium t quia <x prima hominis mnla voluntaie contractum, facium rsl quodammodo hseredltarium.

< l -I la mauvaise Volonté libre du premier homme

qui constitue la nature déchue dans son étal deculpa-