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    1. PECHE ORIGINEL##


PECHE ORIGINEL. LE DEBUT DU XIIIe SIÈCLE

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Cf. S. Ambroise, In Luc, t. VII, n. 73, P. L., t. xv, col. 1718 ; Saint Augustin, Quæst. in Evang., q. xix, P.L., t. xxxv, col. 1340 ; Bède, /nZ, uc., l. III, c.v, P. L., t. xcii, col. 468 : Lalrones… immorlalitatis et innocentiez veste privarunt. Plagse peccata sunt, quibus naturæ humanse integritatem violando, seminarium quoddam (ut ita dicam) augendse mortis fessis indidcre visceribus ; semivivum reliquerunt, quia beatitudinem vitx immortalitatis exuere, sed non sensum rationis abolere valuerunt. Même texte et même sens dans la Glose, éd. de Quaracchi. t. ii, p. 506 ; voir aussi Jean Scot. De divisione naturæ, t. IV, c. xv. P. L., t. cxxii, col. 811.

Chez ce dernier, comme chez les auteurs précédents, il était question, sans plus de précision, de la corruption de la nature telle qu’elle est sortie des mains de Dieu. Chez Pierre Lombard (voir aussi Hugues de Saint-Victor, Alleg. in Nov. Test., t. IV, c.xii, P. L., t. clxxv, col. 814 ; et Instructio sacerd., t. I, c. i, n. 2, t. clxxxiv, col. 775, parmi les œuvres de saint Bernard ) apparaît une précision nouvelle : distinction entre les dons gratuits et les dons naturels : vulneratus in naturalibus, spolialus in gratuilis.

L’altération des biens naturels est expliquée surtout de la « corruption et dépression du libre arbitre ». L. II, dist. XXV. c. vu : Corrupla est ergo libertas arbilrii per peccatum et ex parte perdita.

Comment faut-il la comprendre ? Sans doute dans le sens de saint Augustin. Pierre Lombard emploie le même langage et les mêmes distinctions entre liberum arbitrium et libertas, que l’évêque d’Hippone : Liberum arbilrium dicil hominem perdidisse, non quia post peccatum non habuerit liberum arbitrium, sed quia libcrlalem arbitrii perdidit, non quidem omnem, sed libcrlalem a miseria et peccato. Ibid. ; voir aussi c. vi. Cette corruption du libre arbitre est telle qu’avant d’être restauré par la grâce, celui-ci est d’emblée entraîné par la concupiscence, il peut pécher, et ne peut pas ne pas pécher. Cf. c. viii, ou P. Lombard déclare que la liberté n’est pas la même dans les bons et les méchants ; elle est plus libre dans les bons, pour le bien : dans les méchants, elle va naturellement au mal. Voir aussi c. i.

b. Dans la vie future. Au c. n de la dist. XXXIII, ou il établit que les enfants ne sont p ; j s responsables des fautes de leursparents. Pierre Lombard affirme que les « petits enfants ne souffriront d’autre peine que la privation de la vision béat ilique ; ils ne connaît ront donc ni le feu matériel, ni le ver de la conscience. P. 1*-’. Plus tard, Innocent III. ancien élève de l’école de Paris, dans VÉpltre, i, .">. qui a été insérée au Corpus furis, Décret, ’reg. IX, 1. III. tit. m.ii.c. 3, déclare, à la suite de Pierre Lombard, que le péché’actuel est puni par les tourments de l’enfer et que la peine de la faute Originelle c’esl la privai ion de la vision de I)ieu : Pana originalis peccati est carenlia visionis Dei ; aclualis vern pœna peccati est gehennæ perpétua ; cruciatus. Ed. I’riedbcrg. col. 646.

Ainsi, snus la pression de l’instinct de justice, les docteurs du xir siècle étaient amenés ; i admettl que, déjà au iv siècle, di recs comme Grégoire’le N’azianze ci Grégoire’le Nysse, des Pères latins comme l’Ambrosiaster et Augustin, même dans le lie libéra arbilrio. avaient postulé : un étal intermédiaire entre le ciel d l’enfer : une distinction entre la peine des péchés actuels et la peine du péché originel. Cetti distinct ion pressentie ensuite par un augustinien comme le pap’c Grégoire le Grand, postulée pa

ption de saint Anselme, proposée par Vbélard el irius d’Autun. rendue classique dans l’école par Lombard, recevait ainsi des le commencement du xiii siècle la confirmation de l’autorité’lu v apostolique par la lettre d’Innocent III.

C’est au sein même de l’école augustinienne que s’imposait cet adoucissement à la pensée qu’Augustin avait formulée en face des pélagiens.

e) La rémission du péché originel. - - Pierre Lombard se demande comment le baptême peut bien remettre le péché originel qui est la concupiscence, alors que celle-ci demeure après la réception du sacrement. Sa réponse est meilleure que celle de Robert de Melun et de Gandulphe de Bologne. Le péché originel est remis, dit-il, de deux façons : la concupiscence est débilitée au point qu’elle ne domine plus, et sa culpabilité est enlevée. L. II. dist. XXXII, c. i.

Conclusion. — Avec les Sentences de P. Lombard et les ouvrages similaires, l’influence de la conception augustinienne du péché originel est donc prépondérante à la fin du XIIe siècle et paraît bien avoir l’avenir pour elle. D’une part, l’influence du De conceplu originali de saint Anselme est en sommeil et, d’autre part, celle d’Abélard est rejetée, aussi bien par l’autorité de l’Eglise en ses conciles que par la voix des théologiens. Certes, l’adoption comme livre de texte des Sentences de P. Lombard dans l’enseignement de la théologie va encore élargir l’influence du maître sur le développement de la théologie scolastique postérieure..Mais, voici que des influences nouvelles, philosophiques, avec l’introduction d’Aristote, théologiques avec la réintégration de saint Anselme de Cantorbéry dans l’École, vont se faire sentir et préparer Péclosion des grandes synthèses classiques de la seconde moitié du xiii c siècle.

IV. Le développement de la théologie du

PÉCHÉ ORIGINEL DANS LA PREMIÈRE MOITIÉ DU

xiir 3 siècle. Le XIIIe siècle est une période, de fermentation doctrinale. En philosophie comme en théologie, des points de vue nouveaux apparaissent. L’introduction de la philosophie d’Aristote attire l’attention des théologiens sur la notion de nature en ses éléments constitutifs el. par le fait, sur la distinction dans l’état de justice originelle, entre ce qui relève de la nature et ce qui est surajouté, les dons gratuits : elle préparc les esprits a mieux comprendre el à préciser ce qu’a perdu l’homme déchu : les dons surajoutés à la nature : ce qu’il conserve : la nature avec ses éléments const i t rit ifs. On commence à utiliser aussi les concepts de matière et de forme pour élucider la notion du péché originel.

Les théologiens de la première moitié du xiir siècle se mettent, tout comme leurs prédécesseurs, a l’école de saint Augustin, mais dans des mesures variées.

Tandis que Guillaume d’Auxerre († 1231) et Guillaume Prévostin († 1210) tout particulièrement, subissent son influence surtout par l’intermédiaire fies écrits du Mailre des Sentences. Alexandre de I laies s’attache plutôt à saint Anselme dont il fait valoir les idées sur la nol ion iu péché originel, et au pseudo I)cnys auquel il emprunte sa doctrine sur le caractère privatif du mal et du péché originel en particulier ; le problème est pour lui de concilier les idées augusl iniennes de Pierre Lombard sur le péché originel comme habilualis concupiscentta, avec la notion anselmienne du même péché comme privation de la justice originelle. C’est ainsi, par le docteur franciscain Alexandre de I laies, que la formule et l’idée anselmienne sur la nature t] pi i In originel fait son entrée définitive dans la scolas t Ique. Par lui. elle passera elle/ Albert le ( irand et sera intégrée aux grande* thèses de saint Thomas et de saint l’.onav enturc. Pour donner une Idée plus juste du milieu doctrinal ou vont s’elaborci ces svnlheses Classiques, il faudrait pousser plus avant l’examen de ces doctrines, contenues en des I rail es encore i ned it s

particulièrement c<u d’Etienne Langton, Qusestio ambridge, st. Johns Collège, ms. < :. II. et de Prévost In. (La s a mina théologien jusqu’ici Inédite, con