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PÉNITENCE. LES IV » ET V* SIÈCLES, LES DOCUMENTS


pardon. Nous ne sommes plus seulement ici dans le domaine du for externe, c’est à Yintérieur des âmes qu’opère le pardon de l’Église.

Conclusion. — En définitive, pour différentes que nous apparaissent de la pratique et de la théorie d’aujourd’hui les institutions pénitentielles du m siècle et les idées qu’elles recouvrent, il ne laisse pas d’y avoir entre les unes et les autres un parallélisme qui devient clair à plus ample réflexion. Aveu, satisfaction, absolution, pénétrés par la vertu même du repentir, se retrouvent de part et d’autre. Et l’existence même de l’institution antique témoigne que l’Église a conscience du pouvoir qu’elle a reçu de lier et de délier. Devant les péchés postérieurs au baptême elle n’est pas désarmée. On se tromperait, au reste, en restreignant son pouvoir sur le péché à la seule absolution. Ce pouvoir, il se manifeste dans l’aveu spontané ou provoqué du coupable et dans l’exclusion de la communion eucharistique qui en est la conséquence. Il se manifeste dans l’imposition des œuvres de pénitence et aussi, on l’oublie trop, dans l’efficacité que leur communique l’intervention de l’Église. Il se manifeste enfin dans la réconciliation de ceux qui ont accompli leur pénitence. La transposition qui s’est opérée ultérieurement dans la place de la satisfaction et de la réconciliation, si importante qu’elle soit, ne change pas substantiellement le fond des choses. Lier et délier sont deux actes corrélatifs : la pratique contemporaine perd un peu de vue le premier de ces actes, la pratique ancienne, parce qu’elle appuyait énergiquement sur celui-ci, oubliait quelquefois la considération du second. Dans l’ensemble, néanmoins, le parallélisme est patent de la façon dont l’Église exerce, aujourd’hui comme autrefois, le pouvoir qu’elle a reçu sur les péchés de ses enfants.

IV. La paix de l’Église et l’épanouissement de la discipline pénitentielle (du début du ive au milieu du ve siècle). — Le discipline pénitentielle de cette période nous apparaît en prolongement immédiat de celle dont nous avons décrit le fonctionnement au ine siècle. Les questions traitées aux articles antérieurs Absolution, Confession, etc. se rapportent surtout à la période considérée. — 1° Les documents. 2° La pratique (col. 799). 3° Les théories (col. 809).

I. les DOCUMENTS. — Les documents deviennent si abondants qu’il est impossible de songer à une énumération exhaustive. Bornons-nous seulement aux textes les plus caractéristiques que nous essaierons de classer.

Textes canoniques.

On peut les répartir en

textes conciliaires et textes privés revêtus ultérieurement d’une autorité canonique ; les décrétâtes des papes formant une catégorie spéciale.

1. Textes conciliaires.

Vers la fin du ni" ou au début du ive siècle se placent les conciles d’Elvire (Grenade) en Occident et d’Ancyre (Angora) en orient ; le premier, antérieur à la grande persécution, le m rond vraisemblablement postérieur, Mansi, Concil., t. ii, col. 5-19 ; col. 513 (sur le concile de Laodicée, que l’on en rapproche d’ordinaire, ibid., col. 563, voir l’article I tomes ! i Nous avons déjà signalé l’importance des canons du premier dont beaucoup sont relatifs à la pénitence ; la note caractéristique est la Ité.’III lent que l’Église d’Espagne entend réagir contre an laxisme dangereux ; ce peut être sons l’eflel <lf la crise novatienne. — Les canons d’Ancyre, postérieurs à la persécution, visent suri ont le cal des lapêl. Ils supposent l’existence des diverses stations pénitentielles : on trouvera ans canona 16, 21, 22 des tr.M es non équioques de l’ancienne discipline rcla ! Ive aux péchés Irrémissible*. — Dans les canons dits de Laodicée, un seul, le 2 « , est relatif à la pénitence : il

accorde la réconciliation à toutes les catégories de pécheurs après satisfaction proportionnée.

Sensiblement contemporains, les canons d’Arles (314), Mansi, Concil., t. ii, col. 471-474, témoignent d’une sévérité que l’on peut rapprocher de celle d’Elvire ; cf. can., 14, 22.

Le concile de Nicée (325) a légiféré, lui aussi, sur la question pénitentielle. Pour ce qui est des péchés réservés, il y est fait allusion aux canons 8 (on recevra les novatiens, à condition qu’ils consentent à communiquer avec les lapsi réintégrés), et 13 (la réserve cesse toujours à l’article de la mort, suivant l’ancien usage ecclésiastique), cf. art. Nicée, col. 413 ; diverses dispositions pénitentielles sont signalées aux canons 11, 12, 17 (contre les clercs usuriers).

Le concile d’Antioche de 347, dit concile In eneseniis, Mansi, t. ii, col. 1308 sq., n’a qu’un canon relatif à la matière, mais il est très intéressant. Il vise les chrétiens qui se contentent d’une demi-assistance aux réunions eucharistiques et se retirent après les lectures, sans prendre part à la communion. Ils seront exclus de l’Église, jusqu’à ce qu’ils aient fait pénitence, produit des fruits de repentir et obtenu, par leurs prières, le pardon demandé. Can. 2.

Le I er concile d’Orange (441) est à la limite de la période considérée. Il faut en signaler le canon 3, relatif à la communion à donner aux moribonds et aux règles à suivre en cas de guérison. Mansi, t. vi, col. 435. A rapprocher des canons 76 et 78 du prétendu concile de Carthage de 398 (il s’agit en réalité des Statuta Ecclesiæ antiqua, qui nous transportent d’ailleurs au milieu du vie siècle, voir ci-dessous, col. 822).

2. Lettres canoniques.

On désigne sous ce nom

des lettres écrites, à titre de consultation, par tel ou tel évêque considérable et qui ont été ultérieurement regardées comme des normes canoniques.

La première en date est celle qui est attribuée à Grégoire le Thaumaturge (t vers 270), P. G., t. x, col. 1019 sq. Elle a été écrite à la suite d’une invasion des Barbares dans l’Asie antérieure, invasion durant laquelle les chrétiens avaient pu, en certaines circonstances, faire cause commune avec l’ennemi. Des peines variables sont prévues contre les délinquants suivant leur culpabilité et suivant aussi la plus ou moins grande spontanéité de leurs aveux, n. 8 et 9. Cette lettre nous fournit aussi la première attestation relative à l’existence de diverses catégories de pénitents. En rigueur, il aurait fallu faire état de ce document dans l’étude précédente : il a pu être rédigé après l’invasion gothique de 253-254 ; nous le plaçons ici, car c’est au début de la période que nous étudions qu’il commence à faire figure de document canonique.

La lettre canonique de Pierre I er d’Alexandrie († 311), doit être de l’année 306 ; elle vise surtout le cas des lapsi qui ont été nombreux lors du premier paroxysme de la grande persécution ; les divers cas de conscience sont discutés et des peines variables sont proposées suivant les degrés de culpabilité. La lettre ne semble pas, néanmoins, connaître les diverses « stations pénitentielles » mentionnées par Grégoire le Thaumaturge, encore que des tempéraments divers soient apportés aux peines canoniques. Texte* dans P. G., t. xviii, col. 467-508.

Saint Basile († 379) est auteur, lui aussi, d’un document analogue. La lettre clxxxviii, adressée à Araphilochius d’Iconium, porte dans les collections grecques le titre de 7 re lettre canonique. P. G., t. xxxii, col. 664 sq. Ce qui frappe, c’est la longueur de la pénitence imposée : une durée de 3 à 4 ans n’est pas rare, voir n. M et 7 ; pour l’avortement 10 ans au maximum, n. 2 ; pour l’homicide, Il ans, n. 1 1 ; quant aux meurtres fait ! à la guerre, ils ne sont pas régulière-