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    1. PROPRIÉTÉ##


PROPRIÉTÉ. DONNEES LUI S O LOGIQUES

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offre la même structure qu’au sein des civilisations primitives, avec son double caractère d’individualisme et

de collectivisme..Mais ces deux (rails, ici, sont plus

poussés, ’l’ouï d’abord, l’intervention de l’Étal toté miste se fait plus fréquente, plus effective, plus pesante : à cause de la vie plus sédentaire, l’Étal est tenu de fixer à chaque subdivision de la tribu, aux dans, un territoire beaucoup plus nettement défini que parle passé, comme domaine de chasse ou de cueillette ; en outre, l’acquisition et la consommation des denrées alimentaires sont soumises à des prescriptions étatiques souvent minutieuses et rigides ; on doit en livrer des portions importantes à certaines catégories, notamment aux vieillards, ou bien en certaines circon-Stances déterminées, telles que l’initiation des jeunes gens. En second lieu, le sens individuel de la propriété privée devient beaucoup plus aigu pour tous les objets d’art, d’industrie, que le perfectionnement des techniques, l’augmentation des loisirs, le progrès du trafic et du commerce permettent de multiplier.

b) La civilisation ancienne de droit maternel (avec e.rogamie) résulte du développement apporté à la simple cueillette, transformée parles soins de la femme en petite culture jardinière à la houe. L’activité économique de la femme devient prépondérante ; sa situation sociale se fortifie ; dans la grande maison carrée, solidement construite, la femme règne en maîtresse ; c’est elle qui, la première, est reconnue propriétaire individuelle du sol. L’invention et le perfectionnement des techniques féminines, comme la fabrication des paniers, des poteries, comme le tissage, ajoutent au prestige de la femme. Aujourd’hui encore, dans les pays qui ont conservé cette structure sociale de droit maternel, comme en certains districts de l’Inde antérieure et au delà du Gange, la femme se trouve toujours propriétaire du sol et préside à la vie économique. On constate un fléchissement de l’équilibre dans le sens individualiste, au profit de la femme. Les hommes tentent de réagir : organisés en sociétés secrètes au cérémonial compliqué, au secret rigoureux, ils terrorisent les femmes jardinières et propriétaires, exercent sur elles un véritable chantage, pour contenir leur puissance économique et en définitive pour leur arracher une part des fruits de leurs jardins. Par ce biais, une sorte d’équilibre se rétablit entre les prérogatives individualistes d’une propriété rigoureusement personnelle et les nécessités de la vie communautaire. Cette réaction sera du reste poussée si loin, que l’homme considérera la femme comme une source de richesse à exploiter et bientôt comme une esclave.

c) La civilisation des peuples nomades, éleveurs de troupeaux, issue de la chasse primitive organisée et perfectionnée par l’homme, exerça une grande influence sur l’évolution de la propriété.

En ce qui concerne la propriété du sol, cette civilisation ne différait guère des civilisations primitives de chasseurs. La tribu disposait d’un certain territoire, plus ou moins exactement délimité ; sur ce territoire, les groupes et les familles allaient et venaient sans entraves, pourvu toutefois que la place ne fût pas trop resserrée et que le lieu fût riche de ressources suffisantes. Mais, en ce qui concerne la propriété mobilière, des perspectives pour ainsi dire infinies s’ouvraient aux pasteurs. Avec de l’adresse, de la persévérance, en utilisant le croit naturel des animaux, chacun pouvait se constituer rapidement de grands troupeaux. Le plus difficile et ail de commencer sa fortune ; elle s’édi liait ensuite d’elle-même. La Bible nous fait connaître la richesse de Job. un pasteur bédouin : il possédait sept mille brebis, trois mille chameaux, cinq cents paires de bœufs, et cinq cents ânesses ; après toutes ses épreuves, il reçut en récompense le double, c’est-à-dire quatorze mille brebis, six mille chameaux, mille paires

île bœufs ei mille ânesses. Le I’. w. Schmidt remarque que « es chiffres ne doivent pas être considérés comme pieusement ou poétiquement exagérés et il cite Atkinson rapportant qu’un chef de Kirghiz possédait près di dix mille chevaux, que certains propriétaires de la même tribu en possédaient de cinq à sept mille, sans compter un grand nombre de chameaux, de bêtes à cornes et plus de deux cent cinquante mille moutons. W. Schmidt et W. Koppers, Vôlker und Kulturen, 1925, p. 218. Il va de soi que le soin de tout ce bétail exigeait un nombreux personnel : de là l’importance de la famille patriarcale, comprenant les femmes, leurs enfants, les épouses des lils et leurs enfants, avec une nombreuse domesticité. On considère assez généralement le régime économique des pasteurs nomades. avec les inégalités sociales qui s’ensuivent, comme une forme de capitalisme. Ajoutons que la grande famille patriarcale concentre en soi la plupart des fonctions polit iques : le patriarche est roi. juge, prêtre, chef de guerre à l’occasion. L’éviction du groupe politique est donc compensée par l’extension du groupe familial, et la tendance individualiste est freinée par les charges sociales nombreuses, indéfinies et perpétuelles, de la famille patriarcale.

.’i. La propriété au sein des civilisations moins anciennes ou mixtes. — a) On rencontre aujourd’hui dans la mer du Sud et en Afrique, on soupçonne à l’origine de certaines grandes civilisations de l’ancien Orient (Egypte, Assyrie, Babylonie) et l’on reconnaît en Europe, aux débuts du néolithique, une forme de civilisation notablement répandue, qui combine la grande chasse totémiste et le jardinage de droit maternel. On y trouve réunies la propriété urbaine, artisanale, industrielle et la propriété rurale. Mais cette union ne va pas sans complication. Les divisions sociales usitées en régime totémiste se complètent par une sorte de i mur d’argent » ; la monnaie fait son apparition ; elle s’accumule en certaines mains ; l’usure ne tarde pas à sévir, le taux de l’intérêt atteignant couramment 100 % ; cependant, les emprunteurs ne manquent pas, car l’argent seul permet l’ascension sociale. Les riches, pour manifester leur haute situation, luttent de prodigalité en dissipant leurs richesses, en détruisant leur vaisselle, leur mobilier, même leurs esclaves, à l’occasion de certaines solennités (potlæhs). En ce qui concerne la propriété du sol, l’habitude totémiste de glorifier l’homme et de lui accorder la prépondérance sur la femme s’oppose au rôle de propriétaire qui revient à celle-ci dans la civilisation maternelle de petite culture ; les chasseurs totémistes transmettent leurs biens à leurs propres enfants, tandis que dans la civilisation matriarcale les biens du frère passent aux enfants de la sœur ; ici. un compromis intervient : Seligman rapporte de certaines tribus de Mélanésie que le père partage sa fortune entre ses propres enfants et ceux de sa sœur. D’après C.odrington et Rivers, dans ces régions, la succession passe d’ordinaire aux neveux, mais les enfants reçoivent de la sœur des dons personnels. Ailleurs, c’est le père qui, de son vivant, gratifie ses fils ; mais, à sa mort, il laisse l’héritage aux enfants de sa sœur. Schmidt et Koppers, op. cit., p. 569-570.

b) La civilisation patriarcale des pasteurs nomades, se combinant avec celle de droit maternel, a donné une forme nouvelle de matriarcal, caractérisée parla grande famille, héritage des pasteurs, mais aussi par la vaste et solide demeure familiale que la vie sédentaire permet d’emprunter au régime matriarcal. Le bétail, outre les ressources alimentaires qu’il fournissait aux nomades pasteurs et qu’il procure, plus variées et plus abondantes que jamais, permet de perfectionner l’agriculture eu assurant la traction de la charrue. L’entreprise agricole, connue celle de l’élevage pastoral, exige un nombreux personnel : la mande famille » matriar-